Messe du 33ème dimanche ordinaire

Abbé Claude Pauli, à l’église Saint-Joseph, Genève, le 16 novembre 2008
Lectures bibliques : Proverbes 31, 10-13.19-20.30-31; 1 Thessaloniciens 5, 1-6; Matthieu 25, 14-30 – Année A

 

Chers paroissiens de Saint Joseph et d’ailleurs,
Amis de passage dans notre ville,
Vous qui nous faites l’honneur de nous rejoindre par la télévision,
Mes frères et mes sœurs bien-aimés,
L’évangile de ce dimanche nous laisse un avertissement concernant le bon usage de nos responsabilités et de notre liberté face aux dons reçus. Il peut être lu comme une belle méditation sur la bonté, la confiance et la patience de Dieu.

(DIEU EST BON)
Oui, le Maître est bon, frères et sœurs. Il donne sans compter. Peut-être ne le savez-vous pas, mais un talent représentait alors 15 ans de salaire ! Il donne, oui, mais à chacun selon ses capacités. Dans l’évangile, le Christ nous rappellera aussi « qu’à celui à qui il a été donné davantage, il sera demandé davantage. » N’en déplaise à Rousseau, nous ne venons pas au monde dépourvus ! Mais il est vrai que nous ne recevons pas tous la même chose.
Même si l’on dit souvent que nous ne naissons pas sous la même étoile, le chrétien ne doit pas oublier que nous vivons tous sous un seul et même regard ! Comparaison n’est pas raison.
Devant la tentation de la jalousie qui nous guette tous, sommes-nous vraiment capables de reconnaître tout ce que nous avons reçu de Lui ? En chacun de nous, Dieu a déposé un trésor d’une valeur inestimable. Il est capable de nous rendre heureux lorsqu’on le met petit à petit au service de notre bonheur, du bonheur de nos frères et sœurs en humanité, et en tout cela pour le bonheur de Dieu lui-même.
(DIEU NOUS FAIT CONFIANCE)
Pour réaliser cela, Dieu nous fait confiance. La confiance, nous le savons, c’est un chemin fort pour découvrir l’amour vrai.
* Que de couples déchirés par manque de confiance en l’autre.
* Que d’enfants et de jeunes en échecs scolaires ou vivant une réelle solitude affective, souffrent parce que personne ne leur rappelle de temps en temps, envers et contre tout : J’ai confiance en toi, tu vas y arriver, je suis là…. Dieu est là, Il veille sur toi. Yahla : En avant !
Dieu nous fait confiance à tel point qu’il semble lui aussi parfois ne plus être là : comme ce Maître de la parabole qui le préfigure et qui est parti en voyage. Eloignement salutaire pour nous rappeler combien est grande notre liberté.
Dès le récit de la Genèse, après la création de l’homme, Dieu semble s’effacer pour nous apprendre à mieux mesurer notre mission.
Soit dit en passant, ces apparentes absences du Maître de nos vies nous permettent aussi de mesurer humblement la profondeur de notre foi et de notre espérance. Dans les heures plus sombres où rien ne semble nous réussir, où tout nous tombe dessus, la tentation de tout abandonner peut nous conduire à la déprime.
A l’image du troisième serviteur paresseux qui n’a pas fait sien le souci du bien reçu de son maître, il peut nous arriver d’enfouir ce que nous avons reçu dans un désert de jalousie, de rancœur. Cela peut nous amener, comme nous le montre l’évangile d’aujourd’hui, jusqu’à la récrimination à l’égard de Celui qui nous a tout donné. « Qu’est-ce que j’ai fait au bon Dieu… »
Mais à l’image des deux premiers serviteurs qui, pleins de gratitude, ont fait fructifier les talents reçus, nous pouvons, nous aussi, prendre à cœur notre mission de faire fructifier ce que nous avons reçu. Nous le ferons à la suite de tant de témoins de l’évangile, comme sœur Emmanuelle, en osant croire en la bonté et la confiance de notre Seigneur, et avec l’aide de la prière et de notre eucharistie de ce jour. Un petit conseil pourtant, frères et sœurs : de grâce, ne soyons pas trop pressés. Ne nous énervons pas devant nos lenteurs et celles des autres : Dieu est patient.
(DIEU EST PATIENT)
« Longtemps après, le Maître revint », nous dit encore l’évangile. Dieu est patient. Il nous laisse du temps. Mieux qu’un sablier, nous avons non seulement à écouler ce que nous avons reçu, mais à le faire fructifier. Qui que nous soyons, quels que soit notre âge, nos joies et nos peines, la nécessité d’une vie recomposée, nos échecs et nos lassitudes, que sais-je, gardons confiance. Dieu est capable de faire des lignes droites avec nos courbes. Ecoulé avec amour, le grain de sable devient pépite d’or, trésor de vie.
Nous plongeant dans le silence de Joseph, nous entendrons la voix du Maître qui murmure au plus profond de votre cœur comme du mien : « Ecoute-moi, Il y a toujours, dans un petit recoin de ton être, un talent à faire valoir. » N’est-ce pas un merveilleux message d’espérance qui nous ouvre sans cesse un avenir !
Vous l’aurez sans doute remarqué, la joie du Maître devant la mission accomplie des deux bons serviteurs est identique ; leur travail loué de manière égale. Le temps imparti écoulé, la récompense est unique. Il me semble entendre Dieu dire à chacun : « Ne t’inquiète pas de ce que tu vas m’apporter ; parce que tu as du prix à mes yeux, inquiète-toi du cœur que tu as mis pour me l’offrir. »
Regardez, frères et sœurs, la richesse musicale de notre liturgie. Choristes et instrumentistes : tous au service d’une seule et même louange. Nous aussi nous avons à jouer la partition de notre vie en harmonie avec tous ceux qui nous entourent, en nous mettant tous ensemble au diapason de l’amour de Dieu.
Alors telle une badinerie comme celle de Bach que nous allons entendre dans quelques instants, légère et pleine d’envol, nous nous laissons emporter par l’Esprit. Et avec Marie, ici-bas déjà, nous chantons pleins d’allégresse : « Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu mon Sauveur ».
Au retour du Maître, au soir de notre vie, frères et sœurs, si nous essayons de faire fructifier nos talents reçus, nous partagerons la joie de son royaume, fiers d’en avoir semés quelques miettes ici-bas déjà.
Amen.

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