Messe du 1er dimanche de l’Avent

 

Abbé Michel Salamolard, église Sainte-Catherine, Sierre, le 3 décembre 2000

Lectures bibliques : Jérémie 33, 14-16; 1 Thessaloniciens 3, 12-4,2; Luc 21, 25-36

Fin du monde et
faim d’un monde nouveau

Il y a un peu plus d’un mois, de terribles intempéries jetaient notre canton dans le désarroi. Nous avons compris, à travers cette épreuve, ce que peuvent ressentir tant d’hommes et de femmes, dans le monde entier, lorsque une catastrophe naturelle dévaste un pays: séisme, ouragan, inondations, sécheresse persistante.

Et que dire des malheurs provoqués, non par la nature, mais par les hommes, souvent bien plus meurtriers encore! Guerre, génocides, crimes contre l’humanité, actes de violence et de terrorisme.

Comme tout cela semble faire écho aux paroles de l’Evangile, que nous venons d’entendre! « Fracas de la mer et de la tempête… peur… malheur… puissances des cieux ébranlées… » Nous pensions peut-être que Jésus nous annonçait un événement très lointain, la fin du monde. Et nous voilà en pleine actualité! Celle d’un monde fragile et d’une humanité terriblement ambiguë, capable du pire comme du meilleur. Cette fragilité, cette ambiguïté marquent non seulement le monde, mais notre existence à tous. Il y a la maladie et le vieillissement, les deuils et les chagrins, les séparations et les déprimes, la souffrance et le doute, le mal qu’on nous fait et celui que nous commettons.
Devant pareille réalité, il y aurait de quoi gémir, courber le dos, baisser la tête, se sentir écrasé. Où va le monde ? Et moi, qu’est-ce que je deviens ? Ma vie a-t-elle un sens ? Vaut-elle d’être vécue ?

En même temps, notre cœur est habité par une immense espérance. Elle nous pousse à vivre et à construire, elle nous dit qu’il vaut la peine d’oser la confiance, qu’il est possible d’aimer.
Aujourd’hui, Jésus donne raison à ce désir de vivre, il le stimule et le renforce. « Redressez-vous et relevez la tête, car votre délivrance approche. » Qu’est-ce que cela signifie ?
Jésus propose un autre regard sur la réalité. Là où nous voyons un monde assez chaotique, il semble nous dire : « Le monde est un immense chantier. Voyez, quelque chose se construit. N’ayez pas peur, restez éveillés, participez à la construction. »
Oui, c’est un monde inachevé que Dieu nous a confié, afin qu’en le dominant, en l’aménageant, nous soyons créateurs avec lui du monde de nos rêves.
C’est une humanité en germe que Dieu nous a donnée, afin qu’en la faisant grandir, en la développant, nous devenions les co-auteurs de nous-mêmes et de notre propre histoire.

Dieu a pris le risque fou de nous vouloir libres, le risque fou de nous faire confiance. Ce risque serait totalement irresponsable si Dieu ne s’engageait pas totalement à nos côtés, jusqu’à donner sa vie, pour que l’aventure réussisse. Avec lui, grâce à lui, cette folie est une folie d’amour. Un amour tout-puissant sur lequel nous pouvons miser et avec lequel nous pouvons collaborer de tout notre cœur.

Personne n’est inutile, personne n’est de trop sur ce chantier de l’amour. Vous êtes précieux, vous les parents, parce que vous donnez une chance à la vie et que vous vous mettez à son service.

Vous êtes précieux, vous les enfants et les jeunes, parce que vous préparez l’avenir en construisant votre personnalité.
Vous êtes précieux, vous les engagés dans le monde politique et économique, parce que vos décisions peuvent contribuer au bien commun.
Vous êtes précieux, vous les malades, les personnes handicapées, les aînés et les souffrants, parce que vous êtes la preuve que l’homme ne vaut pas que par ses performances.
Vous êtes précieux, vous les éducateurs, les travailleurs sociaux, les médecins, les infirmiers et infirmières, parce que vous accompagnez et soignez la vie quand elle est blessée ou menacée.
Vous êtes précieux, vous les enseignants, les journalistes et les chercheurs, parce que vous contribuez à faire connaître la vérité.
Vous êtes précieux, vous les artistes, parce que vous nous donnez à contempler quelque chose du mystère et de la beauté du monde, des choses et des êtres.
Vous êtes précieux, vous qui priez, dans quelque religion que ce soit, parce que vous tenez votre cœur et le monde en éveil.

Chers amis, demandons à Dieu de nous donner faim – f,a,i,m – du monde nouveau. Demandons-lui la grâce de contribuer activement, chacun à notre manière, à la construction d’une civilisation de l’amour. Amen.

 

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