Messe du 1er dimanche de l’Avent

 

Abbé Pierre Jaquet , le 2 décembre 2007, à la basilique Notre-Dame, Genève
Lectures bibliques :
Isaïe 2, 1-5; Romains 13, 11-14; Matthieu 24, 37-44 – Année A

 Aujourd’hui s’ouvre une nouvelle année liturgique et les quatre dimanches de l’Avent qui s’offrent à nous se présentent comme un temps de préparation à la venue du Seigneur. De fait c’est à un triple avènement que nous invite la liturgie : la naissance du Seigneur à Bethléem dans le passé, sa venue dans le cœur par la grâce qu’il nous offre aujourd’hui, son retour glorieux à la fin des temps. La liturgie nous invite donc à considérer trois dimensions de la venue du Seigneur : le Christ qui est venu dans le passé, le Seigneur qui vient aujourd’hui, son retour glorieux à la fin des temps.

Comment le Christ est-il venu dans le passé ? Les faits sont certainement les plus connus : la longue attente du messie par le peuple de Dieu, l’annonce de l’ange à Marie, la naissance de Jésus à Bethléem pour laquelle se rassemblent les bergers puis des mages, l’enfance de Jésus jusqu’à ce que ce dernier devenu adulte reçoive le baptême de Jean-Baptiste au Jourdain.

Comment le retour glorieux du Christ se manifestera-t-il à la fin des temps ? Jésus, interrogé sur ce sujet un peu avant dans l’évangile répond : «  Or quant à ce jour et à l’heure, nul ne sait, ni les anges des cieux, ni le Fils, sinon le Père seul ». L’avènement du « fils de l’homme » n’est donc pas à chercher dans le temps mais bien dans la filiation que donne le Père des cieux. Ce qui se manifestera à la fin, c’est déjà ce qui est présent dès le commencement.

Devenir enfant de Dieu implique l’acceptation de ne pas avoir la connaissance de tout. Et en même temps, c’est faire l’expérience de Dieu en tant qu’il est père. Ce qui amène le croyant à savoir que tout est dans sa main. 

Le Seigneur né à Bethléem, le retour glorieux à la fin des temps soulignent l’importance de la venue du Seigneur dans nos cœurs aujourd’hui. Et cette perspective nous interroge : comment le Seigneur vient-il en nous ? Comment fait-il chez nous sa demeure ? Comment la filiation divine qui nous est offerte  grandit-elle en nous? C’est à cet aujourd’hui de la venue du Seigneur que nous convoquent aussi les textes de ce dimanche.

L’évangile nous offre un premier repère. L’enjeu du présent est, comme dit Jésus, « l’avènement du fils de l’homme » auquel il s’identifie. Une question est posée : « A quel commencement nouveau du devenir humain es-tu ouvert ? » Non pas n’importe lequel de ces devenirs de l’homme, mais bien celui dont l’origine est révélée par la parole d’alliance qu’offre le Fils de l’homme. Quel désir en faveur de l’homme révélé par Dieu te tient-il en éveil ? Désir de justice ? Désir de paix ? Désir de réconciliation ? Désir de partage ? Désir d’unité ? Quel manque à la vie de l’homme aujourd’hui te mobilise-t-il ? La faim ? L’insécurité ? L’isolement ?  Quand le Christ parle de lui-même en tant que fils de l’homme, il révèle que tous les hommes reçoivent en lui une unique origine. Et cette origine n’est pas pour les uns et contre les autres.

Un deuxième repère nous est donné par la référence à l’arche de Noé. Celle-ci avait permis à Noé et à sa famille, à ses animaux, d’échapper à la dévastation du déluge. Des commentateurs notent que l’hébreu talmudique peut signifier autant « arche » que « parole, mot, langage ». Ce qui sauve, c’est l’arche qui est aussi parole d’alliance de la part de Dieu. On peut appliquer l’image de l’arche à celle de nos églises, chapelles, oratoires, temples qui se présentent ainsi comme autant  « d’arches » comme autant de lieux où retentit la parole d’alliance qui sauve. La venue du Seigneur dans nos coeurs aujourd’hui  advient quand nous sommes ouverts à de nouveaux commencements de l’homme révélé par le Christ. La venue du Seigneur est aussi celle de sa parole d’alliance qui se présente à notre vie comme une arche par laquelle nous pouvons échapper aux menaces d’aujourd’hui.

Un troisième repère est dans l’invitation à se tenir en éveil : « Veillez donc car vous ne connaissez pas le jour où votre Seigneur viendra ! » Loin d’être une menace, c’est une invitation à entrer dans la filiation de Dieu qui se révèle père. On pourrait dire aussi bien : « Veillez donc car vous êtes enfants d’un Dieu père. Lui sait bien quels sont l’heure et le jour, ne soyez pas inquiet à ce sujet ! Il vous suffit d’inscrire votre vie dans la filiation divine qui vous est offerte. En elle vous avez tout reçu ».
Ce qui permet d’être veilleur n’est pas de tout savoir, mais précisément de découvrir ce qu’on ne sait pas encore de la parole d’alliance. Ce qui permet d’être guetteur, c’est d’être attentif à ces nouveaux commencements du devenir humain, devenir humain qui est à accueillir, à soutenir, à porter.

« Les gens ne se sont doutés de rien jusqu’au déluge qui les a tous engloutis » dit Jésus. Ne se douter de rien c’est vivre enfermé dans l’illusion que l’on sait tout, ne se douter de rien c’est ignorer l’origine commune dans laquelle tout homme trouve sa ressemblance et son image. Aujourd’hui comme hier, de nombreux déluges engloutissent l’être humain : déluge de la violence, de la guerre et de la haine, déluge de la famine, de la maladie, des déséquilibres de la justice, de l’économie, de la politique. Mais aujourd’hui comme hier, il existe aussi de nombreuses arches qui portent et intègrent l’homme dans son devenir humain. Il y a bien sûr les communautés de l’Arche fondées par Jean Vannier ; il y a aussi ces grandes arches que sont les Eglises. Il y a encore tant d’autres arches petites et grandes, toutes surgies de nouveaux commencements au service de l’homme, arches de vie le plus souvent reliées à la parole de l’Ecriture. La prochaine rencontre européenne de Taizé, qui va rassembler en fin d’année à Genève plus de 30’000 adultes la plupart jeunes, en est un signe. Les fêtes du 150e de notre église et paroisse Notre-Dame sont aussi l’occasion de rassembler dans un grand élan de ferveur et de vie des personnes de tous les pays et de toutes conditions. Ces commencements au devenir de l’homme sont aussi chacune de ces visites rendues à une personne malade ou en situation de précarité, chacun de ces gestes de partage avec les plus démunis, chacune des lumières puisées dans l’écoute de la parole de l’Ecriture, parole méditée ou partagée en groupe, parole célébrée aussi dans les sacrements.

« Frères, vous le savez : c’est le moment, l’heure est venue de sortir de votre sommeil. » Cette interpellation vive de Paul s’accompagne de ce merveilleux verset : « Car le salut est plus près de nous maintenant qu’à l’époque où nous sommes devenus croyants ». « Revêtons-nous pour le combat de lumière », « Revêtez le Christ » dit encore Paul.
C’est dans cet élan de l’aujourd’hui de Dieu que nous pouvons vivre l’avènement du Seigneur dans notre vie. Isaïe en exprimait déjà tout le dynamisme.  « Venez, montons à la montagne du Seigneur… il nous enseignera ses chemins et nous suivrons ses sentiers…. Venez, famille de Jacob, marchons à la lumière du Seigneur. » En cette nouvelle année liturgique : « marchons à la lumière du Seigneur » !
 
Notre-Dame de Genève, priez pour nous ! Notre-Dame Messagère de Paix, Priez pour nous !

 

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