Messe de la sainte famille

 

Mgr Pierre Farine, le 30 décembre 2007, à la paroisse Ste-Jeanne de Chantal, Genève
Lectures bibliques :
Sirac 3, 2-14; Colossiens 3, 12-21; Matthieu 2, 13-23 – Année A

Mes bien aimés,

Aujourd’hui en la fête de la sainte famille, nos yeux scrutent cette famille très sainte. La prière que nous venons d’entendre demande au Père  que la sainte famille nous soit donnée en exemple.

On attendrait donc l’image idéale d’une famille en pleine communion, baignant dans la lumière. Une communion sans faille, un havre de paix, une entente parfaite, chacun au service attentif de l’autre.
Le récit de l’évangile que nous venons d’entendre est tout autre. Et pourtant il est un modèle.

Il s’agit d’une famille dans la tourmente, contrainte de s’exiler, une famille jetée sur les routes, affrontant l’insécurité, ne sachant pas de quoi l’avenir sera fait.
J’aime bien le réalisme de ce passage de l’évangile. Comment voulez-vous recevoir en exemple une famille où tout baigne dans l’huile, sans difficulté aucune ?
Je parle de réalisme car beaucoup de nos familles, sans être obligées de s’exiler, connaissent souvent précarité et abandon qui est aussi une forme d’exil. J’ajoute que par le monde, il y a de nombreuses familles qui connaissent les déplacements forcés, dus à la guerre, aux tensions ou à des conditions économiques et sociales désastreuses qui les contraignent à se jeter sur les routes sans être bardées d’assurances en tous genres.

Cependant, la sainte famille est pour nous un modèle. Le Christ Fils de Dieu né dans une famille humaine n’a pas accepté d’être épargné, d’être un privilégié.
Quand, à Noël, nous disons que Jésus a revêtu notre condition humaine hormis le péché, ce n’est pas une figure de style. C’est tout simplement la vérité. Le Christ est vraiment l’un d’entre nous.

Joseph en particulier est un modèle, car on parle beaucoup de lui. Vous aurez remarqué que la mère et de l’enfant sont cités, mais sans les nommer. J’aime à relever le parcours de Joseph dans cet évangile, car durant les fêtes de Noël il est le parent pauvre, passant largement à l’arrière plan.

Il est donc heureux qu’il soit cité en modèle. En quoi l’est-il ?
Joseph reçoit des paroles de Dieu en songe à travers son envoyé qui est l’ange. On ne sait jamais très bien comment ça se passe quand Dieu parle à notre conscience. Toujours est-il qu’à un moment donné la conviction se lève en nous qu’il faut obéir, car c’est le seul chemin pour avancer vers Dieu avec les autres.
Joseph est un juste. Il est fidèle, car il accomplit avec attention et application  la volonté de Dieu. De plus Joseph ne pense pas qu’à lui, mais il prend en charge l’enfant et sa mère. Modèle aussi parce que Joseph accepte d’être bousculé alors qu’il aspirait après les événements de la Nativité à un peu plus de tranquillité.

De retour en Galilée, la famille s’établit à Nazareth. Là encore, Joseph choisit avec soin le lieu le plus approprié pour que la famille puisse vivre dans la paix. On sait qu’elle y a pris racine pendant trente ans. C’est ce qu’on appelle la vie cachée de Jésus. Ces années sans histoire furent remplies. L’Ecriture nous dit que « Jésus progressait en sagesse et en taille, et en faveur auprès de Dieu et auprès des hommes. » (Luc 2,52)

Il est émouvant de découvrir que Jésus s’est soumis à la vie de famille, pendant une longue période. Il a assumé cette condition. Mais cela n’est pas étonnant. Car la vie de famille est le lieu de tous les progrès, de tous les apprentissages. C’en est le lieu le plus commun et en même temps le plus important.

On y apprend le langage de l’amour, du respect réciproque. On y apprend la langue et la culture. On y apprend à se situer, à dire « je », à s’affirmer. On découvre aussi qu’on n’est pas le centre du monde. On apprend des choses toutes simples mais si importantes, comme dire bonjour et merci. On apprend à faire plaisir. On apprend qu’il y a de la joie on apprend qu’il y a des souffrances incompréhensibles souvent injustes. On y apprend la compassion. On y apprend le pardon. On apprend qu’on n’est pas tout et qu’on ne peut pas tout. La famille n’a de sens que si elle est ouverte sur le vaste monde. La famille, cocon chaud rien que pour soi, ne peut en aucun cas être un modèle.

C’est là que j’ai appris qu’il y a un Dieu qui nous aime et qu’il a envoyé Jésus pour nous conduire au ciel. Tout compte fait, la foi, c’est celle de mon baptême, transmise par mes parents, confirmée et nourrie en Eglise qui est aussi ma famille.Ce que nous avons appris, nous a forgés et nous accompagne durant toute notre vie.

Je vous en supplie ayez le culte de la famille.

Aujourd’hui, de nombreux jeunes venus de toute l’Europe nous font l’honneur de venir à Genève et dans ses environs pour un pèlerinage de confiance. Nous les saluons respectueusement et nous sommes en communion avec eux dans la prière et dans la joie d’appartenir à la grande famille des enfants de Dieu.
Vous l’avouerais-je : en vous accueillant chers jeunes, ce sont des frères et des sœurs que j’accueillais, des enfants de la même famille.

Je recommande à Dieu vos familles humaines, vos projets personnels, vos joies, vos peines, je recommande votre pays parfois meurtri par les tensions ou la violence au Père de toute miséricorde.

Amen 

 

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