Messe de la fête de la Pentecôte

 

Abbé Gilbert Zuffery, à l’église de Val d’Illiez, le 3 juin 2001.

Lectures bibliques : Actes 2, 1-11; Romains 8, 8-17; Jean 14, 15-26

« Le souffle en moi s’épuise, je suis à bout de souffle. »
Ces deux petites phrases d’une prière qu’on trouve dans les psaumes de l’Ancien Testament résume bien l’expérience de notre condition humaine engagée dans l’épreuve de notre vie. Cette vie, nous la désirons de toutes nos forces, nous cherchons par tous les moyens à l’épanouir, à l’intensifier et pourtant elle se heurte sans cesse à des limites, à des déceptions, à des échecs plus ou moins graves.

« Le souffle en moi s’épuise, je suis à bout de souffle. »
Il m’arrive de me tromper de chemin, je ne sais plus qui je suis, pourquoi je vis. Je voudrais échapper à la souffrance, je n’y parviens pas. Je voudrais échapper à l’ennui, à la solitude, je me décourage parce que ces moments reviennent, j’ai l’impression que je ne trouve pas la solution.

« Le souffle en moi s’épuise, je suis à bout de souffle. »
La fête d’aujourd’hui peut nous aider à trouver comme on dit « un second souffle » mais ce « second souffle » n’est plus le mien parce qu’il est le souffle même de Dieu. Tout l’évangile est l’explication merveilleuse, sans cesse offerte à l’intelligence du cœur : nous sommes nés non seulement de la chair et du sang mais nés de l’Esprit, cette chair que nous sommes est ouverte à l’Esprit, elle désire l’Esprit, c’est-à-dire la vie éternelle.

Beaucoup n’ont pas compris ce que Jésus voulait dire et même ses amis, les apôtres, ont mis du temps pour réaliser son intention profonde. Car il s’agit d’une transformation qui dépasse infiniment notre imagination. Elle n’est pas de ce monde, inaccessible à nos moyens humains d’investigation et pourtant cette métamorphose est réelle puisque je peux dès maintenant l’éprouver comme plénitude, ouverture, comme ce qui comble et purifie.

Comment y parvenir ?
Il ne s’agit pas de résoudre un problème mais d’être à l’écoute de son propre cœur. Car notre cœur désire l’Esprit, c’est à travers notre individualité, notre être tout entier que l’Infini se dévoile. Il fait entendre sa voix, Il nous appelle discrètement, Il fait sentir sa Présence comme une source intarissable et pleine de douceur. Même nos échecs, nos erreurs, nos égarements, si nous les reconnaissons, peuvent devenir d’excellentes occasions de grandir, de renouer avec cette Présence bienveillante d’un Dieu qui frappe sans cesse à notre porte et souhaite tellement qu’on l’ouvre. Même l’insatisfaction, la tristesse, le goût d’inachevé au cœur de nos plaisirs révèlent en négatif le désir d’avancer toujours plus dans le mystère du cœur humain, dont aucune créature ne peut véritablement combler la faim et étancher la soif.

« Je veux tout », disait sainte Thérèse à son père qui lui demandait de choisir un jouet parmi plusieurs.

Pour goûter à cette expérience de l’Infini, il me faut chercher en priorité le Royaume des Cieux, « Cieux » qui veut dire « choses cachées ». Accepter de se retirer dans le silence intérieur, fermer à clef la chambre de son âme, c’est-à-dire refuser de s’investir uniquement dans les choses, les activités, les soucis du monde extérieur, pour écouter Celui qui frappe sans cesse à la porte du cœur, Celui qui ne cesse de nous inviter au Banquet de la vraie Vie, l’Hôte invisible désirant partager avec nous tout ce qu’Il est : son infinie béatitude et sa beauté inépuisable. Je dis l’Hôte invisible parce qu’Il n’est pas de ce monde, Il n’est pas dans l’au-dehors, ni dans la distance et l’éloignement. Voilà pourquoi le Christ dit à ses amis qui sont dans la tristesse : Il est bon pour vous que je m’en aille ». Cette parole du Christ ne concerne pas seulement ses amis d’alors, mais ses amis de tous les temps. La disparition du Christ ne s’accomplit pas seulement comme un événement historique et passé, mais doit s’accomplir sans cesse si nous voulons à notre tour accueillir l’Esprit.

Il est bon pour vous que je m’en aille sinon vous ne recevrez pas l’Esprit.
L’intention du Christ est de nous dire ceci : il ne faut pas le saisir dans ses apparences extérieures, s’il doit s’éloigner de nous c’est précisément pour être encore plus proche, au-dedans, pour abolir toute séparation; ce que comprendra plus tard saint Paul quand il dira : Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi ». Cette intimité entre le Christ et nous n’est pas visible, échappe à tout regard et à toute objectivité. Voilà pourquoi beaucoup de ceux qui ont vu le Christ n’ont pas cru en Lui et beaucoup de ceux qui ne l’ont jamais vu, et nous en faisons partie, ont éprouvé sa Présence comme la raison d’être de leur existence.

L’Esprit est donc ce souffle de vie, indispensable pour comprendre le mystère du Christ qui est le mystère de l’homme. Sans cette vie infinie l’homme meurt dans un monde sans espoir.

Que l’Esprit vienne sur l’Eglise d’aujourd’hui. N’éteignez pas l’Esprit, dit saint Paul, Dieu est un feu dévorant qui veut brûler en nous.

Ne contredisez pas l’Esprit, car l’Esprit souffre de nos refus et n’a qu’un désir : c’est d’être en nous le défenseur, le consolateur, le maître intérieur. Il nous aide à traverser toutes les épreuves de la vie.

 

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