Messe du 4e dimanche de l’Avent

 

 

Chanoine François Roten, à l’abbaye de Saint-Maurice, le 23 décembre 2001

Lectures bibliques : 2 Samuel 7, 1-16; Luc 1, 26-38

Au cours de cet Avent, la liturgie a fait défiler devant nos yeux nombre de témoignages de prophètes – et c’est précisément cet agir prophétique qui a guidé notre méditation de dimanche en dimanche.
Les prophètes sont des hommes de Dieu, qui ont annoncé, chacun à sa manière et selon son charisme propre, la venue de Jésus-Christ, le Messie attendu.

« Prophète » : divers entendements
Les multiples facettes du rôle de prophète sont mises en relief par les diverses significations du préfixe « pro » de ce mot pro-phète.

1) »Pro » peut signifier « pour », « en faveur de », le même sens que l’on retrouve dans l’expression « pro-patria », une fondation en faveur de la patrie.
Le prophète est celui qui parle et agit en faveur de Dieu et des hommes. Il est le défenseur, l’avocat de Dieu dans le combat de la lumière et de l’obscurité.
Souvenez-vous, le 1er dimanche de l’Avent, nous étions invités à nous mettre en marche, à sortir de notre sommeil et des ténèbres pour mener le combat de la lumière. Nous étions invités à être des prophètes qui parlent et agissent en faveur de Dieu, pour témoigner de son existence aux yeux du monde.

2) »Pro » peut aussi signifier « devant », et l’on retrouve par exemple ce sens dans le mot français « projeter », jeter devant, en avant.
Le prophète, c’est celui qui, à l’image de Jean-Baptiste, que nous présentait l’évangile du 2e dimanche de l’Avent, s’est tenu devant Dieu puis fut envoyé devant les hommes pour annoncer la bonne nouvelle. Le prophète est celui qui prépare le chemin pour le salut, qui aplanit la route devant le Seigneur, qui prépare le terrain.

3) »Pro » signifie encore « avant » comme dans le français « prophylaxie », qui est un ensemble de mesures prises avant l’apparition d’une maladie, afin de la prévenir.
Le prophète est celui qui annonce les événements avant qu’ils n’arrivent, qui donne des signes, qui est lui-même un signe pour ses contemporains, comme le fut Jean-Baptiste que tous allaient voir au désert et dont Jésus disait, dans l’évangile du 3e dimanche de l’Avent, qu’il était le plus grand des enfants des hommes. Jean-Baptiste qui, ayant annoncé la venue du Messie, ayant fait son devoir de prophète, se mettaient cependant à douter, tout prophète qu’il était…

4)Enfin, « pro » peut être traduit par « à la place de », comme le « pronom » est utilisé grammaticalement pour remplacer le nom.
Notre prophète de ce 4e dimanche de l’Avent, c’est saint Joseph, époux de la vierge Marie.

Joseph le prophète
Joseph est prophète parce que c’est un homme juste, c’est-à-dire quelqu’un qui agit en faveur de Dieu, qui ne craint pas de mettre en pratique la volonté de Dieu.
Il est prophète aussi parce qu’il se tient devant Dieu qui vient le visiter par son ange.
Il est prophète encore par le rôle qui lui est confié d’être celui qui prépare un cadre humain, une famille, pour le Fils de Dieu qui va venir.

Mais Joseph est prophète surtout parce qu’il agit « à la place » du Père invisible. Il fait sur terre ce que Dieu lui-même ne pouvait pas accomplir : être le père visible et humain qui donne son nom à l’enfant Jésus; être le père qui donne sa tendresse à Jésus, afin qu’il grandisse dans la connaissance et l’expérience de l’amour que Jésus lui-même annoncera; Joseph est aussi le père qui saura respecter la vocation exceptionnelle de son fils.

Oui, frères et sœurs, Joseph, le prophète qui agit à la place du Père éternel est un père modèle qui au-delà du mystère de la conception virginale de son fils, offre son « oui » et sa vie pour que Dieu qui a pris chair puisse devenir pleinement homme. La disponibilité et l’humilité de Joseph permettent à Jésus d’entrer sur la terre dans une famille, pauvre peut-être, mais heureuse de l’accueillir, de le choyer, de l’aimer; une famille qui va aider Jésus à grandir, qui va littéralement l’élever pour qu’il devienne un homme.

Prophète selon notre charisme propre
Comme Joseph, comme Jean-Baptiste, comme Isaïe, comme le psalmiste, comme saint Paul et tant d’autres, chacun, chacune de nous, en tant que membre baptisé du corps du Christ, est prêtre, prophète et roi.
Chacun selon l’appel qui nous est propre, selon nos aptitudes et les dons que nous fit le Seigneur, doit agir comme prophète.
Cela ne signifie pas que tous nous devions courir au désert, vêtus d’une peau de bête, en prêchant la conversion. Non, il n’est pas même besoin d’ouvrir la bouche pour être prophète : Joseph, dans tous les écrits qui nous parlent de lui n’a rien dit. Si Marie, à l’annonce de l’ange, demande des renseignements, Joseph, lui, ne dit rien. Il écoute, il agit, selon la parole de Dieu. Il fait ce que Dieu lui demande, et humblement il accomplit son rôle de père.

Nous pouvons être prophètes dans le simple accomplissement de notre devoir d’état, en vivant au jour le jour en fidélité à la parole reçue de Dieu.

Le Seigneur est à notre porte
Frères et sœurs, nous sommes aux portes de Noël et nous célébrerons demain dans la nuit la naissance du Christ sauveur.
Ce n’est pas la simple commémoration d’un anniversaire, comme nous, hommes et femmes, nous aimons à fêter le jour de notre naissance. Noël est certes l’anniversaire de Jésus, mais dans la célébration liturgique de cette fête, il se passe un phénomène extraordinaire, qui dépasse notre entendement humain : nous sommes mystérieusement mais réellement rendus contemporains du jour où le Christ est né.

Les Pères de l’Eglise et parmi eux particulièrement saint Léon, insistent sur ce fait : ce jour de Noël, Dieu nous accorde ses bienfaits et renouvelle pour nous ses grâces. Ce n’est pas un passé, mais un présent.
« Hodie Christus natus est ». Aujourd’hui le Christ est né, aujourd’hui un sauveur nous est donné, aujourd’hui la paix véritable vient sur la terre.)

Puisse le peuple de prophètes que nous sommes se réjouir de la venue imminente du Messie tant attendu.

 

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