Messe du dimanche de la Sainte Trinité

 

Chanoine Guy Luisier, église de Salvan, le 19 juin 2011
Lectures bibliques : Exode 34, 4-9; 2 Corinthiens 13, 11-13; Jean 3, 16-18Année A

 

La Trinité… Un vieux mot un peu usé, diront certains. Très théologique et trop catéchétique, donc éloigné de nos préoccupations ordinaires, diront d’autres, avec un brin de raison peut-être. Et un petit malin pourra même ajouter que cela le fait penser à une chanson de son enfance, celle de Malbrough qui reviendra de guerre à Pâques ou à la Trinité, comme on dirait à la Saint Glinglin. Pas très encourageant…

Pourtant, a priori méfions-nous des vieux mots, ils semblent endormis et voilà qu’ils peuvent se réveiller soudain et apporter un vent de fraicheur sur nos désespérantes banalités ordinaires. Car en fait de quoi est fait notre ordinaire, notre vie de tous les jours ? Essentiellement d’un vrai besoin d’exister et d’être reconnu en face des autres. Et de communiquer vraiment ce que l’on est. 

  Or justement, derrière le mot Trinité se trouve un trésor que notre société d’aujourd’hui cherche désespérément à l’horizon de ses avancées techniques et technologiques : communiquer plus et mieux. On ne peut qu’être impressionné par les avancées formidables et fondamentales de la communication, dans ses aspects techniques.

Nous vivons dans un réseau technologique dense de moyens qui nous permettent de communiquer avec les autres. Que de progrès, techniques à tout le moins, en quelques dizaines d’années.
Ici dans notre village de Salvan, nous le savons particulièrement bien. En effet à la fin du 19e siècle, en 1895, au temps de la poste à cheval et des diligences, a eu lieu un événement qui en apparence pour les gens de la région était assez anecdotique. Un touriste excentrique essayait de communiquer avec un garçon du village en lui envoyant à quelques dizaines de mètres, des signaux électriques, sans fil. Bizarre, Bizarre. Gugliemo Marconi, oui le Marconi, se livrait à des expériences techniques farfelues avec des perches et tout un attirail de choses… C’était les tout débuts de la télégraphie sans fil. Les années suivantes ont fait de Marconi un prix Nobel ; et dans son génial sillage, on voit de loin en loin la radio, le téléphone, les satellites, l’internet, et cette toile impressionnante des réseaux sociaux qui lui sont liés.

Cette histoire est technique. Elle est merveilleuse bien sûr mais elle est purement technique car – nous le savons bien – il y a un besoin de communiquer à l’intérieur de l’homme. Et les réponses techniques extérieures sont belles mais insuffisantes. En fait on communique bien, non pas à coup de technologies sophistiquées, mais au moyen d’un cœur qui se donne, qui s’ouvre et qui se dit.

Lorsque ce cœur se laisse baigner de saine intelligence, lorsqu’il est travaillé de vraie sagesse, alors un espace s’ouvre, un espace de vraie communication, de vraie communion. Et heureusement, même ceux qui n’utilisent pas de téléphone portable et ne connaissent même pas la signification du mot numérique peuvent communiquer vraiment. On ne communique vraiment que quand on donne, quand on se donne, se livre… quand on dit ce que l’on est et non pas ce que l’on a.

Ici se posent alors deux questions fondamentales : Pourquoi un tel désir de communiquer inscrit au cœur de l’homme, et pourquoi ce désir n’est-il jamais assouvi, pourquoi « toujours plus » ? C’est ici qu’intervient la Trinité.
La Source de notre vie, (cette Source indicible en laquelle les croyants de multiples et belles traditions trouvent leur Dieu), cette Source est une mais elle n’est pas uniforme, disent les chrétiens, elle est communicante par nature, à l’intérieur d’elle-même et vers nous. Dieu est communion. Dieu communique en soi. Il se donne tout entier. Le Père n’est père parce qu’il communique son être à son Fils dans un élan de joie qu’on appelle Esprit !
« Oui, mais qu’est-ce que cela peut nous faire ? » diront les esprits les plus chagrins.  Et bien justement, dit la Bonne Nouvelle : « Cela te fait ! ». Tu ne serais pas ce que tu es, si Dieu n’était ce qu’il est. Tu n’aurais pas ce désir de communiquer, de communier à l’autre, et cela toujours plus et toujours mieux, si le Dieu communion ne l’avait pas inscrit dans ton cœur. Parce que cela fait partie de ce qu’il a de plus beau à donner.
La création nait et continue cet éternel courant de communication et de communion qui lui vient de son Créateur qui est Trinité. Peut-être avez-vous l’impression que je plane en disant cela. Alors évitons les mots savants et rejoignons notre quotidien. Chaque fois que je sors de chez moi, que je sors de moi par désir d’aller vers l’autre, de le découvrir, je parle par ma vie d’un Dieu qui éternellement sort de soi, pour venir vers nous.
Chaque fois que je veux communiquer plus et mieux, connaître plus et mieux, je parle de Dieu qui nous attire dans son plus et mieux divin. Ce que je vis banalement tous les jours dit banalement quelque chose de Dieu. Tout simplement.

Mes frères, mes sœurs,
Au début de mon homélie, j’ai évoqué les débuts de la téléphonie mobile ici à Salvan, à quelques mètres derrière notre église paroissiale, et je l’ai présentée comme le début du formidable effort de l’homme dans le domaine de la communication. En fait il me faut maintenant me corriger. Les vrais débuts de l’essor de la communication se trouvent bien avant la technique et même bien avant l’homme. Dès son éternité, Dieu communique et est communion. Il y a une source communicante au début éternel de tout. Il y a un éternel océan de communication à la fin éternelle de tout.

Dans cet océan de joie, le Père et le Fils et l’Esprit de Dieu, reçoivent en eux notre fondamental désir de communiquer ce que nous sommes en vérité.
Alors ? La Trinité, un vieux mot un peu usé et dépassé ? Peut-être que non, la belle réalité qu’il cache nous dit l’avenir positif de notre constant besoin d’être en réseau, d’être avec, de nous dire et de nous faire comprendre. La parole de Paul prend alors un relief fantastique : « Encouragez-vous, soyez d’accord entre vous, vivez en paix et le Dieu d’amour et de paix sera avec vous ».

Notre but c’est d’être vraiment en réseau dans la communion de Dieu, Père qui nous aime, Fils qui nous sauve et Esprit qui nous vivifie.

 

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