Messe du 16e dimanche du temps ordinaire

 

Mgr Bernard Broccard, Vicaire général de Sion, abbaye de St-Maurice, le 17 juillet 2011
Lectures bibliques :
Sagesse 12, 13-19; Romains 8, 26-27; Matthieu 13, 24-43 – Année A

Le récit de la parabole du bon grain et de l’ivraie que nous venons d’entendre dans l’évangile de ce jour nous est bien connu. Il nous renvoie à un constat que nous pouvons tous faire : dans notre monde, le bien et le mal se côtoient. L’amour est présent partout, mais le péché aussi. Et même si l’Église est sainte parce qu’elle est Corps du Christ, elle est aussi marquée par le péché tout simplement parce qu’elle est composée d’êtres humains imparfaits, y compris parmi ceux qui se sont engagés dans un service ou un ministère d’Église.
Le monde d’aujourd’hui ne se gêne pas pour nous le rappeler en exigeant partout le risque zéro dans le choix des collaborateurs de l’Église comme des collaborateurs d’autres institutions d’ailleurs. Cela ne peut m’empêcher de faire le lien avec la parabole de ce jour où les serviteurs du maître viennent lui dire : « ‘Seigneur, n’est-ce pas du bon grain que tu as semé dans ton champ ? D’où vient donc qu’il y a de l’ivraie ?’ » Il leur dit : ‘C’est un ennemi qui a fait cela.’ Les serviteurs lui disent : ‘Alors, veux-tu que nous allions l’enlever ? »

Cette demande part d’une bonne intention. Et je ne dis pas qu’il ne faut pas prendre les mesures nécessaires pour empêcher autant que possible que le mal et le péché ne prospèrent. Mais jusqu’où peut-on aller ? Le Seigneur nous invite à la prudence. En effet, dans la parabole de ce jour, le Maître demande aux serviteurs de ne pas enlever l’ivraie, de peur qu’en enlevant l’ivraie, ils arrachent le blé en même temps.
La tentation de vouloir enlever l’ivraie dans l’Église ou dans la société est récurrente. Et le Seigneur laisse entrevoir qu’une telle méthode peut être à l’origine de bien des abus et de toutes les dictatures. La société parfaite n’est qu’un rêve. Ce n’est pas à la portée de l’homme. Dieu seul peut réaliser la société parfaite, mais c’est au ciel et non pas sur la terre. Car l’homme est un être limité et faillible et l’ivraie pousse également en chacun d’entre nous et pas seulement chez les autres.

Est-ce que cela signifierait alors que Jésus nous demande de ne pas lutter contre le mal et d’attendre patiemment la fin du monde sans rien faire ? Certainement pas ! Il faut lutter contre le mal, mais en utilisant les moyens de Dieu. On peut bien sûr faire des lois pour lutter contre le mal, et c’est même nécessaire, mais celles-ci doivent toujours respecter l’homme comme Dieu nous le demande. C’est déjà un premier pas. Mais cela ne suffit pas.
En fait, pour lutter contre le mal, Dieu nous demande davantage. Il nous appelle à proclamer la Bonne Nouvelle, à semer avec lui le bon grain. Et c’est là qu’il nous demande de mettre toute notre énergie. Si nous mettons toute notre énergie pour arracher l’ivraie, nous ne la mettrons pas pour semer et laisser le bon grain grandir et porter du fruit. Sans parler du fait que notre combat est vain puisque l’homme est incapable de rendre ce monde parfait. Et puis, de toute façon, comme le dit Jésus dans la parabole de ce jour, à la fin du monde, l’ivraie sera brûlée. Le mal sera définitivement détruit.
Autrement dit, l’important, c’est d’avoir le plus de blé possible. L’ivraie se combat par la croissance du blé. Si nous faisons tout pour favoriser la croissance du blé en nous et autour de nous, c’est l’ivraie qui sera étouffée. Si nous mettons toute notre énergie à faire le bien, le mal va perdre de sa force. Et cela, les saints l’ont bien compris.

En effet, contrairement à certaines idées reçues, les saints et les saintes ne sont pas des hommes et des femmes parfaits, comme au-dessus de la mêlée. Ce sont des personnes comme vous et moi, des personnes avec leurs qualités, leurs défauts et leurs limites. Mais s’ils ont été reconnus comme saints, c’est parce qu’ils ont tellement aimé Dieu et les autres qu’on ne voit presque plus leurs défauts.

À travers la parabole de l’ivraie et du bon grain, Jésus nous invite donc à l’espérance en portant notre regard sur la moisson à venir plutôt que sur la crainte de l’ivraie.

Le Seigneur nous invite aussi à la confiance. Même si le mal paraît dominer en ce monde, le Royaume des cieux est bien présent, comme un grain de moutarde qui va grandir, quoi qu’on fasse, ou comme le levain dans la farine qui va faire lever la pâte, quoi qu’on fasse.
À un journaliste qui demandait un jour à la bienheureuse Mère Teresa de Calcutta ce qu’il fallait faire pour changer le monde, elle répondit : « Il faut commencer par nous changer nous-mêmes, vous et moi. » Bref, devenons des saints ! Luttons pour que le bon grain grandisse en nous et l’ivraie s’étiolera. Faisons le bien et le monde commencera à changer !
« Celui qui a des oreilles, qu’il entende ! »

 

 

 

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