Messe de la fête du Christ Roi de l’Univers

 


Père Luc Ruedin, jésuite, Home St-Joseph, Cressier, le 26 novembre 2006
Lectures bibliques : Daniel 7, 13-14; Apocalypse 1, 5-8; Jean 18, 33-37 – Année B

« Donc tu es roi ? » lui dit Pilate
« Tu le dis ! Je suis roi » répondit Jésus

Chers frères et sœurs, chers amis qui nous rejoignez par les ondes,

L’Eglise nous donne de célébrer aujourd’hui la fête du Christ, Roi de l’Univers. Soit ! Mais de quel règne s’agit-t-il ? Du règne d’un roi tyran de son peuple ? Du règne d’un souverain heureux de dominer ? Ce règne s’exercerait-il par un pouvoir intransigeant qui ne tolère aucune incartade, aucune rébellion ?

Non me criez-vous : Le Règne du Serviteur de l’Homme, du Christ roi de l’Univers est tout autre. Il est de service et d’amour ! Et vous avez mille fois raison ! Ce règne est d’ailleurs tellement différent que ce que spontanément nous imaginons, qu’Il nous surprend toujours. Il brise tellement notre manière de voir que nous avons de la peine à comprendre en quoi il consiste. Plus encore, de la peine à en vivre !

Le règne du Christ Roi de l’Univers s’exerce par une Puissance, par un Souffle qui donne la Vie. Il n’est pas un pouvoir sur les autres qui est si souvent un pouvoir …de mort ! Comme dans le Règne végétal la sève vient nourrir le cep, l’Esprit d’Amour du Ressuscité vient nourrir nos propres vies. Puissance de Vie, Son règne n’est pas visible. Dans la foi, il est pourtant sensible au cœur. Il suscite notre désir d’aimer et d’être aimé. Il se reconnaît à l’attraction qu’il exerce sur nous. Oui, par son Esprit, le Ressuscité vient répondre à notre soif d’amour et de vie. Par la force de Sa Parole, Le Christ Roi de l’Univers nous attire et nous donne de rayonner de Sa Présence.

La royauté du Christ ne consiste donc pas à imposer, à peser, à exiger. Son seul pouvoir est de faire croître et d’attirer. Sa puissance lui vient du Père qui le glorifie. Il est à la droite de Dieu. Par la force de son Esprit, le Maître de la Vie nous donne de participer à Sa gloire. Par sa Parole aussi tranchante que le glaive – « Tu l’as dit je suis roi !» -, le Seigneur de l’Univers enlève nos doutes et, dans la foi, nous attire vers le Père. Vraiment, Jésus-Christ est le Maître, Jésus-Christ est Seigneur.

Refrain : Il est le maître, il est Seigneur

L’Evangile proclamé, comment alors se laisser interpeller par l’écho de cette voix qui ne s’impose pas à la manière du monde ? Comment se laisser toucher par Sa ferme douceur, Sa souveraineté tendre ? Comment découvrir la Présence du Seigneur qui donne la Vie ?

Mystère de la foi ! Chacun, chacune peut faire l’expérience un jour, non dans l’ouragan mais dans la brise légère, lorsque tout s’apaise en lui, de cette Présence silencieuse qui sauve du malheur. Retentissant à l’intime de nous-mêmes, la voix du Seigneur ne se confond pas avec celle du monde : Celui qui parle est le Maître de la Vie ressuscité d’entre les morts. Comme le soleil vient au matin ouvrir la corolle de la fleur par la chaleur de son rayonnement, sa Présence nous guérit de nos peurs et de nos angoisses. Elle nous rassure, telle une mère rassure son petit en le blottissant en son sein. Elle nous parle en ce cœur à cœur réservé au seul Seigneur. Source jaillissante qui nous met debout Sa Présence investit nos vies en y faisant régner paix et joie.

Oui, Décidément Sa royauté ne vient pas d’ici-bas. Elle n’est pas comme celle des princes de ce monde ! Tout un chacun a pu, un jour, rencontrer un homme, une femme qui revêtait une fonction d’autorité. Tout un chacun connait des hommes des femmes dont émane une autorité naturelle. Ces autorités, légitimes ou naturelles, lorsqu’elles sont justement exercées, sont nécessaires. Elles sont toutefois limitées. Jésus ne les abolit pas. D’une autre nature, son autorité vient d’ailleurs. Mais d’où vient-elle ? D’où lui vient cette autorité qui s’exerce dans l’Evangile – pensons à Zachée, Bartimée, Lazare et tant d’autres – et qu’Il continue par Son Esprit à exercer mystérieusement en notre cœur ?

Son autorité lui vient de sa mission. Lui, l’Envoyé d’auprès du Père vient témoigner de la vérité de l’Amour. Son témoignage, c’est sa vie donnée pour le Salut du monde. Déjà dans le premier Testament, la royauté de Jahvé s’exprimait par le don de la Loi. L’observer libérait du péché et de la mort. L’observer faisait entrer dans l’Alliance.

En Jésus cette Alliance s’accomplit pleinement en notre chair. Dans la foi, Jésus nous communique cet Amour qui vient de Dieu seul. Par son souffle, il nous donne d’en être à notre tour les témoins. Il vient par son Esprit éclairer notre vie, éclaircir notre existence, rendre lumineuses nos relations. Venant habiter de Sa Présence, Lui le Vivant, nos existences fragilisées par la maladie, la vieillesse, l’angoisse de la mort, il règne déjà et baigne de sa lumière nos abîmes les plus obscurs.

Seul celui qui nous connait au plus intime peut ainsi régner. Seul un tel Roi peut exercer de l’intérieur de nous-mêmes cette autorité souveraine qui libère de tout ce qui emprisonne, de tout ce qui enferme, dévie, amoindrit, blesse. Ce Roi n’est pas n’importe quel roi. Il se reconnait, tel le Bon Pasteur, à son attention aimante. Il peut nous rejoindre quand et comment Il veut. Sa Royauté n’est pas de ce monde. Il est Souverain du temps et de l’histoire, il est le Maître, il est Seigneur.

Refrain : Il est le maître, il est Seigneur

Comment alors ne pas la désirer cette autorité souveraine qui nous délivre de tout mal ? Jésus, l’homme venu de Dieu, témoin unique de l’Amour qui vainc la mort, est notre seul secours. Il ne parle pas de Dieu. Il parle à partir de son expérience d’Amour qu’il a avec le Père. Cela change tout ! C’est parce qu’il vit l’Amour, qu’il dit l’Amour, qu’il donne l’Amour qu’il est Seigneur et que nous le fêtons comme le Christ Roi de l’Univers !

Cette royauté là est certes, nous disent Daniel et le livre de l’Apocalypse, promise à la fin des temps. Mais elle s’exerce aujourd’hui déjà pour qui demeure en la Présence de Jésus. Transfigurant nos épreuves, nos souffrances, nos peines, animant nos joies et bonheurs, sa Présence vient habiter nos existences nous donnant un avant-goût du Ciel. Déjà nous vivons sur la terre comme au Ciel.

Cette royauté de Jésus, cette Présence souveraine qui prend la voix, le chemin du Serviteur ne peut que nous toucher. L’Infini vient habiter notre finitude, le Très-Haut devient le Très-bas. Qui a déjà vu un maître prendre la tenue de serviteur sait ce que je veux dire. Qui a déjà vu un puissant de ce monde reconnaître sa faiblesse mesure l’humilité souveraine qu’il faut pour le faire. Qui a fait l’expérience de ce retournement des Béatitudes en connait le prix et la valeur. Il sait alors d’expérience, parce qu’il a été rejoint en sa propre chair, que le Salut est entré dans sa maison. Eclairant de l’intérieur ce qui est obscur, redressant ce qui est dévié, libérant de ce qui retient captif, élevant les humbles, guérissant les malades, comblant de biens les affamés, le Christ vit cette surprenante royauté qui est forte de sa faiblesse, rayonnante d’avoir pris sur elle le plus obscur, triomphante d’avoir essuyé l’échec.

Chers frères et sœurs, chers amis, Comment dans les temps d’épreuve personnelle, lorsque le désespoir submerge l’espérance, que la peur envahit et fait reculer la confiance, que la violence semble gagner sur l’Amour, comment ne pas désirer l’autorité souveraine de Celui qui est le Maître qui est Seigneur ? Et lorsque nous sommes envahis par cette Présence souveraine si respectueuse qui nous guérit et nous fortifie, comment alors ne pas rendre grâce ?

Refrain : Il est le Maître, il est Seigneur

 

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