Messe du 3e dimanche de Carême

 

Abbé Jean-Marie Pasquier, le 24 février 2008, à la chapelle N.-D. de la Compassion, Bulle
Lectures bibliques : Exode 17, 3-7; Romains 5, 1-8; Jean 4, 5-42 – Année A

« Donne-moi à boire ! » C’est la demande d’un homme fatigué par une longue marche sous le soleil, il a soif…  Jésus demande à boire à une femme de Samarie.

Combien sont-ils aujourd’hui dans le monde qui pourraient  nous dire aussi : « donnez-nous à boire » ? Ils sont des centaines de millions à manquer non seulement de pain, mais encore d’eau, une eau potable,  qu’ils puissent boire sans tomber malades, parfois au risque d’en mourir. C’est en leur nom à tous que Jésus se tourne vers nous ce matin : « donnez- leur à boire ! » A nous qui n’avons qu’à ouvrir un robinet  pour recevoir un si bonne eau – surtout à Bulle ! – mais qui bien souvent la gaspillons, sans penser à ceux qui en manquent cruellement…

Mais il n’y a pas que le manque d’eau. On peut manquer aussi d’autre chose.  Comme cette femme de Samarie  qui en est à son cinquième mari… Qu’est-ce qu’elle cherche ? De quoi a-t-elle soif, si ce n’est d’être aimée vraiment et de pouvoir aimer, s’attacher à quelqu’un,  sans crainte d’être abandonnée.  Ce matin, je pense surtout à vous les jeunes. On dit que vous avez tout, que vous ne manquez de rien, sauf peut-être de ce qui compte le plus,  c’est qu’on s’intéresse vraiment  à vous, qu’on vous reconnaisse, qu’on vous aime tels que vous êtes… Comme chacun de nous au fond, quel que soit notre âge… Ne sommes-nous pas tous un peu des mendiants d’amour ?

Mais derrière ce désir qui nous habite tous, je crois qu’il y a une autre soif, encore plus profonde  et plus mystérieuse que la soif d’eau ou la soif d’aimer, c’est la soif de la Source. Comme un désir d’enfant  au bord du ruisseau : ah ! si  je pouvais remonter jusqu’à la source ! Peut-être que je n’aurais plus jamais soif ? Jésus a deviné ce désir chez la samaritaine : « Si tu savais le don de Dieu  – ce que Dieu veut et peut te donner -, et qui est celui qui te dit : `donne-moi à boire ‘, c’est toi qui lui aurais demandé,  et il t’aurait donné de l’eau vive…   Qui boira de cette eau n’aura plus jamais soif. Car cette eau deviendra en lui source jaillissante pour la vie éternelle. »  Vous vous rendez compte ? C’est extraordinaire !  Non seulement  celui qui boit de cette eau n’aura plus soif, mais il deviendra lui-même comme un puits d’où jaillit la source d’eau vive… » Jésus le redira encore un peu plus tard à la foule rassemblée devant le temple de Jérusalem : « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et qu’il boive… Celui qui croit en moi, des fleuves d’eau vive jailliront de son cœur. » C’est quoi cette eau vive ? L’évangile répond : « Jésus parlait de l’Esprit saint que devaient recevoir ceux qui croiraient en Jésus. » Et qui un jour recevraient le baptême…

Vous, les jeunes catéchumènes, avez-vous pensé que c’est ce qui doit vous arriver la nuit de Pâques ? Etre baptisé, ce n’est pas recevoir quelques gouttes d’eau sur le front, c’est accueillir l’eau vive de l’Esprit au fond de vous. C’est être, comme Jésus lui-même, immergé, plongé dans le fleuve de « l’amour de Dieu répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné ». Voilà ce que dit saint Paul aux chrétiens de Rome : « la preuve que Dieu nous aime, c’est que le Christ est mort pour nous », pour que chacun de nous. Oui, chacun de nous peut le dire : « Jésus m’a aimé et s’est livré pour moi. »

Le baptême n’est pas un rite magique, c’est le signe d’un engagement personnel, un acte de foi en Jésus qui nous dit : si tu as soif, si tu viens à moi, si tu crois en moi… – autrement dit, si tu me fais totalement confiance -, alors tu recevras mon Esprit, alors tu vivras de ma vie. Et même, tu pourras devenir à ton tour comme une source de vie pour les autres. Comme le Christ lui-même l’a été pour toi.

Sur la croix  Jésus a redit une dernière fois : « J’ai soif ! » C’était le cri d’un corps déshydraté par la torture de la passion, mais aussi l’appel d’un cœur d’homme, un cœur de fils disant à son Père : « J’ai soif de Toi.  Viens à mon secours !»  N’est-ce pas aussi un appel  qu’il nous adresse encore à nous aujourd’hui : « J’ai soif de vous, de votre amour… et j’ai besoin de vous, les baptisés, pour que vous soyez  comme les puits vivants  où d’autres jeunes, ou même des adultes – pourquoi pas vos parents, pourront  venir, comme la samaritaine, puiser un peu d’eau fraîche, un peu d’amour pour reprendre la route… 

Avec cette eau, je rêve aussi que nous puissions  ensemble irriguer notre terre, pour la rendre plus viable, plus fraternelle,  et que tous puissent y partager  – comme nous le montre la tenture de Carême – le pain quotidien, et un jour le bon vin du Royaume éternel.  Ce jour n’est-il pas arrivé ? C’est l’Eucharistie que nous allons maintenant célébrer. Amen.

 

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