Messe du 11e dimanche ordinaire

 

Chanoine Olivier Roduit, à l’abbaye de St-Maurice, le 13 juin 2010
Lectures bibliques : 2 Samuel 12, 7-13; Galates 2, 16-21; Luc 7, 36 – 8, 3 – Année C

 

 

Chers frères et sœurs, chers amis,

Si vous lisez comme moi l’Echo Magazine, l’excellent hebdomadaire des familles chrétiennes de Suisse romande, vous aurez lu aussi la semaine dernière la chronique du prévôt Claude Ducarroz qui rapporte cette histoire (Echo Magazine du 3 juin 2010).
Dans une grande église de chez nous, les lectures et l’homélie parlaient de l’amour de Dieu, de cet amour qu’il faut aussi répandre sur son prochain pour faire comme Jésus. Le prêtre insistait en demandant aux chrétiens de passer aux actes. Mais sur le parvis de l’église, un mendiant peu ragoûtant tendait une main suppliante qui, de toute évidence, incommodait les braves paroissiens. On leur avait bien parlé d’amour, mais là… Ça coinçait. Comment faire ? Ni une ni deux : l’excellent prédicateur sort du sanctuaire et chasse sans ménagement cet intrus qui dérangeait, une fois de plus, les chrétiens pratiquants à l’issue de la messe !

Chers frères et sœurs, chers amis, cette histoire, mais surtout les textes bibliques que nous venons d’entendre nous posent cette interrogation incontournable : Comment faire l’unité de notre personne entre ce que l’on croit et ce que l’on vit ? Comment laisser l’amour transformer notre vie ?
C’est bien la grande question : Qu’est-ce qu’aimer ? Comment aimer ? Qu’est-ce que l’amour ? Comment vivre le grand amour ? Les poètes, musiciens et artistes du monde entier et de tous les temps ont cherché à donner une réponse à ces questions fondamentales. Mais y en a-t-il vraiment une ?

Et voilà que l’Evangile d’aujourd’hui nous oriente vers une réponse bouleversante à ces interrogations de toujours.
Nous voyons, en face de Jésus, deux personnages principaux : le pharisien Simon et la pécheresse.
Aux termes de la loi, Simon le pharisien a tout fait juste. Il connaît les règles religieuses, sait ce qu’il faut ou ne pas faire pour être en règle avec Dieu – et il croit l’être. Il n’a pas grand-chose à se reprocher : J’ai pas tué, j’ai pas volé, je n’ai fait de mal à personne…
Et il y a cette femme… dont on ne connaît pas le nom – car on pourrait tous s’y reconnaître. La note explicative de la Bible de Jérusalem prend même la peine de préciser qu’il ne faut l’identifier ni avec Marie de Béthanie, la sœur de Marthe (Lc 10,39), ni non plus avec Marie de Magdala (Lc 8,2).
C’est une femme de mauvaise réputation. La seule chose qu’elle semble connaître de la loi, c’est qu’elle n’y est pas conforme, qu’elle est pécheresse, et cela les hommes du village le savaient bien aussi !
Mais elle sait aimer, elle sait demander pardon, elle sait trouver Jésus en vérité. Elle est admirable dans son grand amour qui se moque des convenances. Son cœur est brûlant, et ses nombreux péchés sont consumés par son amour. C’est Jésus qui le dit : « Si ses nombreux péchés sont pardonnés, c’est à cause de son grand amour… Ta foi t’a sauvée, va en paix. »

Vous me direz, chers amis, qu’il nous est difficile de vivre un tel amour dans notre vie de tous les jours, et que ces réflexions ne sont que des propos de curé du haut de sa chaire dominicale. Relisons donc la première lecture pour voir comment le repentir sincère de David lui vaut un pardon qui le fait échapper à un terrible châtiment divin.

Reprenons aussi la deuxième lecture, la Lettre aux Galates. Saint Paul dit les mêmes choses que l’Evangile, ou presque, mais avec d’autres mots. « Ce n’est pas en observant la loi que l’homme devient juste devant Dieu, mais seulement par la foi au Christ… Car personne ne devient juste en pratiquant la loi ».
La loi conduit à la justice des hommes qui jugent selon la manière de voir des hommes ; et la foi ouvre à la justice de Dieu. Et Dieu respecte infiniment la dignité de tout homme, quoi qu’il ait fait.
La loi est extérieure, et la foi est intérieure.
La foi est intérieure et va transformer toute notre vie, tous nos actes. « Avec le Christ, dit saint Paul, je suis fixé à la croix : je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi. Ma vie aujourd’hui dans la condition humaine, je la vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et qui s’est livré pour moi. »
Mais c’est un chemin difficile – très difficile -, mais passionnant que d’essayer de se conformer à l’amour, que de laisser le Christ nous transfigurer et transfigurer notre vie. N’essayons rien par nos propres forces, nous n’irons pas bien loin, mais confions-nous à l’amour.
Il n’y aura alors plus à se casser la tête pour savoir ce qu’il faut faire pour laisser l’amour régner ; il suffira de laisser jaillir le parfum précieux que Dieu a mis en nous ; c’est lui qui agira en nous.
Seigneur, foyer d’amour, fais-nous brûler de charité.
Amen

 

 


 

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