Messe du dimanche des malades

Père Jean-Daniel Balet, à l’église Saint-Joseph, Genève, le 2 mars 2008
Lectures bibliques : Ephésiens 5, 8-14, Jean 9 – Année A

 

Tout commence par un regard !
Le regard de Jésus posé sur cet homme aveugle, mendiant au bord du chemin.
Un vrai regard d’amour et de compassion… et pourtant Jésus est en fuite. Alors qu’il enseignait dans le Temple, les Juifs ramassèrent des pierres pour les lui jeter et l’évangéliste Jean ajoute : « Jésus se déroba et sortit du Temple ».
On lui jette des pierres comme à la femme adultère ; on chasse Jésus du Temple comme on expulsera l’aveugle guéri ! Agressé, méprisé, chassé… Jésus a choisi son camp : il est du côté du pauvre et du malheureux.
Lorsque Jésus, en fuite, choisit de s’arrêter et de poser son regard sur cet homme aveugle : c’est un vrai regard. C’est comme si Jésus allumait la lumière dans la vie de cet homme et décidait de sortir cet aveugle de l’obscurité dans laquelle il se trouve.
En prenant le temps de regarder ainsi, Jésus prend la mesure de la souffrance et de la difficulté de la vie de cet homme. Jésus pose ce même regard d’amour et de compassion sur chacun d’entre vous.
L’homme aveugle est prisonnier de la nuit. Cette souffrance rejoint la situation de tant d’hommes, de femmes et d’enfants auxquels nous pensons particulièrement en cette Journée des Malades.
Souvent la maladie se conjugue avec la solitude, la nuit, le froid, la tristesse…un chemin pénible sur lequel il est tellement important d’être réchauffé par la présence lumineuse de frères et de sœurs qui, comme Jésus, se rendent proches de la personne malade et osent un regard, un geste, une parole !
Les disciples remarquent le regard de Jésus et ils sont gênés par ce trop grand amour et par le handicap de ce malheureux ; ils attendent des réponses toutes faites : qui a péché, pourquoi la maladie, pourquoi ce malheur ? Jésus refuse de répondre comme un maître qui connaît toutes les solutions ; il refuse de chercher dans le passé une explication à la situation de cet homme. Un passé qui dicte sa loi et qui enferme dans un verdict sans appel : c’est un handicapé, un étranger, un pécheur etc…
Lié à cet homme par le regard d’amour qu’il pose maintenant sur lui, Jésus devient l’avocat de l’aveugle et défend la valeur de sa vie : cet homme aveugle et méprisé est un enfant de Dieu. Dieu veut se manifester en ce mendiant. La vie de cet homme va dire Dieu : quelle mission extraordinaire !
C ’est la vocation de l’aveugle mais c’est aussi notre vocation à chacun : quel que soit notre âge, notre handicap, notre langue, notre race ou notre religion.
Ce matin acceptons de nous laisser regarder par le Christ-Lumière !
Ce matin ouvrons-nous à l’œuvre de Dieu et je pense particulièrement à vous frères et sœurs malades qui allez recevoir le sacrement des malades. Dieu va se manifester en vous !
Mais comment Jésus s’y est pris pour « allumer » en quelque sorte cet homme éteint, prisonnier de la nuit ?
Jésus fait un geste étrange. Il mélange sa salive avec de la terre et applique cette boue sur les yeux de l’aveugle.
La salive c’est très intime ; on pourrait presque dire que la salive porte le secret de la personne, sa signature. C’est une manière pour Jésus de dire à l’homme aveugle : je serai toujours avec toi. Je fais alliance avec toi ; je suis ton ami.
La terre évoque la glaise originelle et rappelle le texte de la Genèse qui nous parle de la création de l’homme. « Dieu modela l’homme avec la glaise du sol, il insuffla dans ses narines une haleine de vie et l’homme devint un être vivant ». Chaque homme est un projet, une création de Dieu. Par le geste qu’il pose Jésus recrée, remet en marche cet homme aveugle.
Jésus est venu pour que nous ayons la vie. « Réveille-toi, ô toi qui dors, relève-toi d’entre les morts et le Christ t’illuminera »
Rencontre étonnante : pas un seul mot n’a encore été échangé.
Jésus a regardé, compris, aimé, touché… quelque chose de mystérieux se passe, au-delà des mots : dans le secret des cœurs.
« Va te laver à la piscine de Siloé » cette première parole de Jésus va mettre en route l’aveugle vers la guérison et vers la foi. Cet homme autrefois mendiant et aveugle, assis au bord du chemin, devient maintenant notre guide sur le chemin de la foi et du témoignage.
Il devient l’avocat de Jésus et sans aucune crainte, il témoigne du miracle qui est intervenu dans sa vie : « Il a ouvert mes yeux d’aveugle ».
Seul contre tous, il fait face à ses adversaires. Il a même le courage de proclamer que Jésus est un prophète. L’aveugle a choisi son camp, il reste fidèle à Jésus. Son témoignage va lui coûter cher, il vient de retrouver une vie normale (il voit, il se déplace librement, il a droit à la parole) et déjà les adversaires de Jésus le chassent du Temple.
Au moment le plus difficile – expulsé, isolé – l’homme guéri découvre que Jésus est là qui le cherche et qui veut lui parler. Jésus ne l’a pas abandonné !
Alors l’aveugle confesse que Jésus est le Seigneur. Dans un geste d’adoration, il se prosterne devant lui. Voilà le grand miracle, l’aveugle voit non seulement avec les yeux mais avec le cœur.
Jésus a révélé à cet homme qu’il était porteur de la lumière de Dieu.
Jésus a non seulement redonné la vue à cet homme mais il a déposé au fond de son cœur sa propre lumière.
L’aveugle devient porteur de lumière.
L’histoire de cet aveugle c’est notre histoire.

Aujourd’hui le Christ pose son regard d’amour et de compassion sur chacun de nous !
Aujourd’hui Jésus nous touche par sa parole et nous envoie dans le monde porter sa lumière !

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