Messe de Pâques

 

Abbé Pascal Desthieux, Villarimboud, FR, le 11 avril 2004.

Lectures bibliques : Actes des Apôtres 10, 34-43; Luc 24, 13-35

« Il est vraiment ressuscité ! »

Frères et sœurs, Christ est ressuscité, il est vraiment ressuscité !

Vraiment ? Mais en êtes-vous bien sûr ? Ne vous est-il jamais arrivé de douter ? Et si tout cela n’était pas vrai ?

Je dois bien vous avouer qu’en étant jeune, je me suis posé cette question. Et aujourd’hui encore, je rencontre des jeunes et des moins jeunes qui doutent. Tiens, récemment, lors d’une journée de préparation à la confirmation, on avait demandé aux jeunes d’écrire sur des panneaux intitulés « Père, Fils, Esprit Saint, Église, autres » quelle était leur foi. Eh bien, un confirmand a écrit : « Jésus-Christ, c’est une invention pour faire venir les gens »… « Est-ce que Jésus a vraiment existé ? » C’est une question que nous entendons souvent.

Qu’il ait vraiment existé, cela on ne peut sérieusement le remettre en doute. Vous savez certainement que nous avons plusieurs écrits d’historiens comme Tacite ou le juif Flavius Josèphe, d’écrivains comme Suétone ou même de gouverneurs romains comme Pline le Jeune qui parlent de ce fameux « Yeshou de Nazareth », que l’on appelle le Christ.

Mais qu’il soit ressuscité… C’est une autre affaire. Les historiens n’en parlent pas. C’est une affaire de foi ! Mais nous allons voir que cette foi ne repose pas sur du vide, mais sur du solide.

Soulignons tout d’abord la portée de cette question. On ne peut pas se la poser sans ressentir un certain vertige. Car s’il n’est pas ressuscité, alors tout s’écroule ! Le christianisme, l’Église, l’Evangile, la messe, la vocation religieuse, tout devient faux ; ce n’est plus qu’une gigantesque supercherie… Si le Christ n’est pas ressuscité, écrit l’apôtre Paul, nous sommes les plus malheureux des hommes. Parce qu’alors, nous ne sommes plus sauvés, nous ne faisons plus que vivoter en attendant de mourir et de disparaître définitivement…

Au contraire, si le Christ est ressuscité, alors tout s’éclaire, tout devient possible : les miracles sont peu de choses à côté de sa résurrection. On commence à comprendre comment il a pu prendre vie humaine dans le sein de la Vierge Marie, conçu l’Esprit Saint. Les paroles qu’il a prononcées prennent vie : « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps », « Celui qui croit en moi vivra ». Si le Christ est ressuscité, alors nous aussi pourrons ressusciter avec lui. Notre vie prend sens, et dès maintenant, elle est habitée par une présence.

Vous voyez, cette question n’est pas anodine. C’est le centre absolu de notre foi. Alors, comment en être sûrs ? Etre certains que nous n’avons pas été trompés, et qu’il est vraiment ressuscité ?

Tout d’abord, je trouve très réconfortant pour nous, qui nous posons cette question, de savoir que cela n’a pas été non plus évident pour les apôtres. Dans l’Évangile que nous venons d’entendre, l’apôtre Jean précise avec humilité : « Jusque là, en effet, les disciples n’avaient pas vu que, d’après l’Ecriture, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts ». Apparemment, c’est la surprise totale. Quand Marie-Madeleine court annoncer à Pierre que le tombeau est vide, il se précipite plus inquiet qu’heureux. Il a fallu l’acte de foi du plus jeune disciple : « Il vit et il cru ».

Dimanche prochain, nous entendrons la suite de cet Évangile : Jésus apparaît aux apôtres, mais Thomas est absent. Et, vous le savez bien, il faudra que Jésus revienne le dimanche suivant pour que Thomas croit enfin et dise : « Mon Seigneur et mon Dieu ». Jésus ajoutera, justement à notre intention : « Parce que tu m’as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu ».

Les apôtres ont été les premiers surpris ; ils ont eu un mal fou à croire que Jésus était vivant. Et ils ont eu l’humilité de le reconnaître. Ils ne l’auraient certainement pas fait s’ils avaient tout inventé. Il y a comme un message entre les lignes : « La résurrection, c’est incroyable. Nous aussi, on a eu beaucoup de mal à le croire, et pourtant, c’est bien ce qu’il s’est passé, nous en sommes témoins ».

Le deuxième argument, je l’emprunte à mon grand oncle Jean Guitton, écrivain, philosophe, artiste, et scientifique. Il constate que tous les apôtres (à l’exception de Jean) et beaucoup de disciples sont morts martyrs à cause de leur foi dans le Christ et en sa résurrection. Supposons qu’il s’agit d’un gigantesque canular, que les apôtres et de nombreux disciples se seraient réunis en disant : « On sait bien que ce n’est pas vrai, mais on va faire croire à tout le monde qu’il est ressuscité, qu’on l’a vu vivant ». Eh bien, ajoute Jean Guitton, comment se fait-il, au moment où ils doivent verser leur sang s’ils maintiennent leur foi et leur affirmation, qu’il n’y en est pas au moins un qui vende la mèche : « Arrêtez, ne me tuez pas, ce n’est pas vrai ». Nous avons la preuve du témoignage par le sang versé.

Jean Guitton conclut : « Ou donc j’accepte le mystère [de la résurrection], ou alors je dois me rabattre sur une absurdité plus obscure que tous les mystères et qui ne rend même pas compte des faits normaux. (…) La résurrection est un fait mystérieux, qui le niera ? Mais si je n’admets pas raisonnablement ce mystère, c’est toute la réalité plus empirique que je suis obligé de transformer en histoire de fous »1.

Comprenons bien que la résurrection que nous fêtons solennellement aujourd’hui, ce n’est pas une option à prendre ou à laisser ; c’est la pièce maîtresse sur laquelle tout repose. C’est, écrit Jean Guitton, « la seule case sur laquelle il vaille la peine de jouer. Si elle est vraie, tout le reste est vrai. Et si elle est fausse, tout s’écroule »2.

Mais il faut ajouter encore que malgré tout, ces arguments restent dans l’ordre de la raison. Un non-croyant, ou même un « peu croyant » ne sera pas vraiment convaincu par ces raisonnements. Il s’agit bien d’une question de foi. Si vous avez expérimenté la présence du Christ vivant dans votre vie, alors c’est sûr, c’est clair, il n’y a plus de doute possible : le Christ est ressuscité, il est vivant !

Bien sûr, nous pouvons faire confiance aux Apôtres et aux disciples qui auraient difficilement pu inventer cela, et qui sont allé jusqu’au bout de leur témoignage, jusqu’au don de leur vie, et tant de milliers de chrétiens les ont suivi sur la voie du martyr. Mais rien ne remplacera notre témoignage de foi. Nous aussi, soyons des témoins convaincus de cette bonne nouvelle qui change notre vie : « Le Christ est ressuscité, il est vraiment ressuscité ! ». Il nous donne sa Vie et nous vivons de Lui. Amen ! Alléluia !


1 Jean GUITTON, Mon testament philosophique, Presses de la Renaissance, Paris, 1997, p. 77.
2 Ibid, p. 69.

 

 

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