Messe du 7e dimanche de Pâques

 

Chanoine Olivier Roduit, à l’abbaye de St-Maurice,VS, le 8 mai 2005.

Lectures bibliques : Actes 1, 12-14; 1 Pierre 4, 13-16; Jean 17, 1-11 – Année A

Frères et sœurs, chers amis,

 

En ce marial mois de mai, le visiteur qui arrive dans notre basilique, avant même de remarquer les nouveaux aménagements du chœur, aura certainement le regard attiré par la magnifique statue de la Vierge qui trône au sommet de la nef. La mère de Dieu est représentée dorée et brillante, enveloppée tout entière d’une sorte d’auréole ovale faite de rayons lumineusement jaunes. Cette mandorle destinée à mettre en valeur la Vierge s’appelle une « gloire ».

Si le mois de mai et plus particulièrement cette fête des mères nous invitent à contempler les gloires de la Vierge, la liturgie d’aujourd’hui nous propose plutôt de nous laisser éblouir et envelopper par la gloire de Dieu.

Il en a été question dans la prière d’ouverture, dans la 2e lecture et dans l’évangile. De plus, l’Ensemble vocal de Saint-Maurice nous a émerveillés par un magnifique Gloria d’une messe de Monteverdi après nous avoir demandés, dans le chant d’entrée, de dire la gloire de Dieu.

Le mot « gloire » évoque pour nous la grandeur et les honneurs. Mais en langage biblique, la gloire exprime plutôt l’idée de « poids », « d’importance », de « splendeur ». Dieu est glorieux en ce sens qu’il pèse pour nous, que son rayonnement et son éclat ont de l’importance pour nous. Les croyants qui s’expriment dans la Bible aimeraient tant faire connaître à tous la « gloire » du Dieu de leurs pères découverte dans leur propre histoire. Pour les chrétiens, Jésus manifeste cette gloire par sa vie, sa mort et sa résurrection : « Père, l’heure est venue. Glorifie ton Fils, afin que le Fils te glorifie. »

À la contemplation d’un tel mystère de gloire, comment les disciples ne peuvent-ils pas eux aussi glorifier Dieu et laisser leur vie se faire envelopper dans cette magnifique mandorle glorieuse ?

Mais Jésus savait bien que ce mouvement vers la gloire nous serait bien rude. Lui, il était le Fils de Dieu, est ressuscité dans la gloire, mais nous, nous sommes encore dans le monde. Sachant la difficulté à vivre sur cette terre, ce n’est pas pour rien qu’il prie en notre faveur.

Tant de créatures merveilleusement belles nous empêchent hélas d’accorder toute notre attention au Seigneur de gloire. Vous connaissez peut-être cette histoire arrivée un jour au grand saint Bernard. Il avait parié un âne avec un paysan qui lui assurait arriver, lui, à prier sans distraction un Notre Père. Le brave homme se recueille et commence :

Notre Père qui es aux cieux… Ah ! c’est bien vrai mon Père que vous allez me donner un âne, n’est-ce pas ! Il sera à moi si…

Continuez, continuez ! lui dit le saint.

Notre Père qui es aux cieux, que ton Nom soit sanctifié… mais vous savez, un âne, ça coûte cher ! Alors en fait, c’est bien promis ?

N’allez pas plus loin, c’est inutile, voilà déjà deux fois que vous vous arrêtez, deux fois que vous êtes distrait !

Eh oui, frères et sœurs, chers auditeurs, une question toute simple se pose à nous. Qu’est-ce qui a du poids dans notre vie ? Qu’est-ce qui est vraiment important pour nous ?

Nous sommes emportés par une existence avec tant de soucis et de préoccupations très terre à terre. Notre corps et sa santé, notre travail et nos loisirs, notre cœur et nos amitiés, notre esprit et nos contradictions nous distraient tant du seul but vers lequel nous marchons. Mais pourtant, grâce à la prière de Jésus nous osons nous faire les pèlerins de la confiance marchant sur une route qui pourrait être toute droite, mais que nous parcourons en zigzagant de gauche et de droite ; un petit peu à l’image du petit chien qui accompagne son maître en suivant une multitude d’odeurs fugaces dans tous les sens.

Risquons la confiance. Avec le Christ nous ne prenons aucun risque ! Nous marchons vers la vie éternelle puisque nous connaissons Dieu.

Saint Pierre, dans sa première lettre, avait fait avant nous la même réflexion. « Puisque vous communiez aux souffrances du Christ, réjouissez-vous, afin d’être dans la joie et l’allégresse quand sa gloire se révélera ». Oui, chers amis, au lieu de nous plaindre sans cesse de nos contrariétés, réjouissons-nous !

Permettez-moi au passage de faire allusion à la polémique autour de la nomination de notre nouveau pape. Quel que fût l’élu du conclave, il eut été étiqueté et catalogué : progressiste ou conservateur. Je ne doute pas que Benoît XVI est un homme de prière et de contemplation ; qu’il se rappelle, comme l’a écrit saint Pierre, que l’Esprit de Dieu repose sur lui. Prions pour qu’il n’ait « jamais de honte et qu’il rende gloire à Dieu à cause de son nom de chrétien ».

Préoccupés par tant de soucis terre à terre, mais sûrs de notre vocation à la gloire, nous faisons confiance à l’Esprit de Dieu, à ce souffle merveilleux de fraîcheur. Saint Martin avait dit que la prière est la respiration de l’âme. Prier consiste à respirer à fond du côté du ciel. Une aspiration de ce merveilleux souffle, de cet air pur spirituel chasse les miasmes de ce pauvre monde asphyxiant.

Vivons plus haut, plus proches de Dieu qui est l’air pur et vivifiant de notre âme. Et comme les sportifs s’entraînent à l’effort physique, musclons notre âme en respirant joyeusement du côté du ciel, en prenant le temps de le faire régulièrement au cours d’une prière sereine et confiante. Le souffle de l’Esprit nous permettra d’affronter bien des difficultés de la vie et ira même jusqu’à nous donner d’avoir part à la gloire de Dieu !
Amen.

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