Messe du 6e dimanche de Pâques


Abbé Pierre Aenishänslin, au Séminaire diocésain LGF, Villars-sur-Glâne, FR, le 5 mai 2002

Lectures bibliques : Actes des Apôtres 8, 5-8 et 14-17; 1 Pierre 3, 15-18; Jean 14, 15-21

« Je ne vous laisserai pas orphelins. »

« Moi, je prierai le Père et il vous donnera un autre défenseur qui sera toujours avec vous ; … c’est l’Esprit de Vérité…. Vous, vous le connaissez parce qu’il demeure auprès de vous » (Jn 14, 16-17).

Jésus parle ainsi avant de vivre l’horreur de sa Passion et il veut aider ses disciples à surmonter un effondrement bien compréhensible. Il veut rassurer ses disciples et leur donner « des provisions » pour affronter les événements qui arriveront jusqu’au jour où ils le reverront VIVANT. Ils seront enfin capables de le reconnaître comme sur le chemin d’Emmaüs, de comprendre son rôle et sa mission.

Tout reviendra lumineux, ils auront enfin l’intelligence des Ecritures.
N’est-ce pas là la nouvelle et définitive formulation de l’Alliance ? « Nul ne peut aller au Père que par moi » répétera souvent Jésus et nous savons que notre amour de Dieu passe par la fidélité au message du Fils.
Voilà le couronnement de tout ce que le Christ a pu nous dire et nous donner : La présence trinitaire au cœur de notre propre cœur.
Les rêves des prophètes sont dépassés : Quand Osée dira au nom du Seigneur : « je te fiancerai à moi pour toujours » (Os 2, 21) ou Isaïe annonçant la présence d’un Dieu venant puiser, en nous, sa joie (Is 62,5) ils ne formeront pas une telle promesse !
Aujourd’hui, l’annonce dépasse même l’entendement :
Il s’agit d’ACCUEILLIR en nous la personne même de Dieu, la présence même du Père que ciel et terre ne contiennent pas, la Présence vivante de l’Esprit qui remplit l’univers.
La présence – dans ma vie de femme, d’homme fragiles – de Dieu, Père Fils et Esprit Saint.

Aujourd’hui, dans la simplicité limpide de la Parole qui nous révèle toute chose, cette promesse extraordinaire tombe sur nous.

Là, maintenant, dans ma vie, le Père, le Fils et le St-Esprit, le Dieu vivant et vrai veut venir habiter. Et non point pour y passer mais pour y demeurer ; non point pour une rencontre d’un jour, mais pour un « séjour » une « demeurance » qui ne finira jamais.

Mais pour l’heure, c’est lui le premier qui veut habiter en nous. Il ne suffit pas au Christ de savoir que nous serons demain dans sa maison.
Dans l’impatience paisible de l’amour dont il brûle pour nous, il se tient à la porte et il frappe : « Si quelqu’un entend ma voix et qu’il m’ouvre la porte …. j’entrerai pour souper, moi près de lui et lui près de moi (Ap 3,20).

Il veut venir, il veut entrer, il veut demeurer.
« Si quelqu’un m’aime et garde ma parole, mon Père l’aimera, et nous viendrons en lui et nous ferons en lui notre demeure (Jn 14,23).

Jésus avait longuement parlé de l’essentiel aux disciples. Mais qu’avaient-ils compris ? Nous savons d’expérience combien le langage est une médiation imparfaite et souvent piégée. D’une part les mots ne suffisent pas à dire les vérités les plus profondes et d’autre part il n’est jamais évident que celui qui écoute comprenne exactement le propos de celui qui parle. Il importait donc que Jésus substitue sa présence physique par une présence spirituelle afin de les pénétrer de sa présence intime pour faire passer son message de la mémoire et du savoir à l’intelligence du cœur et que sa parole soit source de Vie.

Au cœur de notre cœur Dieu est établi. Et ne disons pas comme Jacob « Dieu était là et je ne le savais pas ». (Gen 28,16).
Et me tardons pas à l’accueillir pour ne pas pleurer comme St-Augustin d’avoir tant attendu pour l’aimer et nous laisser aimer :

Tard, je t’ai aimé, ô beauté si ancienne et si nouvelle. Dieu, tard je t’ai aimé.
Mais quoi ! Tu étais au-dedans de moi et j’étais, moi, en dehors de moi-même !
Et c’est au-dehors que je te cherchais ;
Je me ruais dans ma laideur, sur la grâce de tes créatures.
Tu étais avec moi et je n’étais pas avec toi.
Tu m’as parlé, mon Dieu, et ton cri a forcé ma surdité.
Tu as brillé et ton éclat a chassé ma cécité ;
Tu as exhalé ton parfum, je l’ai respiré.
Et voici que pour toi je soupire.
Je t’ai goûté et j’ai faim de toi, j’ai soif de toi.
Tu m’as touché et je brûle d’ardeur pour la paix que tu donnes.
Quand je te serai uni de tout moi-même, il n’y aura plus pour moi de douleur, plus de fatigue ;
Et ma vie, toute pleine de toi, deviendra la véritable vie.
(Les Confessions, 10/38-39).

Frères et sœurs, vous êtes peut-être alités, touchés par la maladie, vous vivez peut-être de grandes difficultés sociales, familiales ou économiques, sachez que le Seigneur ne vous laisse pas orphelins : sa bouleversante Présence est là, discrète.
Ouvrez-lui votre cœur, vivez dans l’espérance. Et qu’il vous donne des frères, des sœurs, des amis attentifs et solidaires qui seront parmi nous signes de son Amour.

 

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