Messe du 6e dimanche de Pâques

 

Abbé Canisius Oberson, église du Bon Pasteur, les Geneveys-sur-Coffrane, le 29 mai 2011
Lectures bibliques : Actes 8, 5-8. 14-17; 1 Pierre 3, 15-18; Jean 14, 15-21 – Année A

« En ce jour-là, vous reconnaîtrez que je suis en mon Père, que vous êtes en moi, et moi en vous ». Ce jour-là, c’est aujourd’hui, pour tous les chrétiens qui accueillent le Christ en eux. Les disciples du Christ vivent en effet en communion avec lui, en communion avec le Père, et en communion entre eux. Et ils sont appelés à rayonner l’amour de Dieu à la terre entière, selon son commandement.

Tout cela est bien beau, me direz-vous, mais qu’est-ce que cela veut dire concrètement dans nos vies ?
Être dans le Christ, en Dieu, cela ne veut souvent plus dire grand-chose à nos contemporains, occupés à cent activités toutes plus brillantes et intéressantes les unes que les autres. Il suffit de penser à la place des nouvelles technologies et du monde virtuel qui s’ouvre quasi à l’infini quand on tapote sur un clavier d’ordinateur ou de téléphone portable. Et puis parfois par la faute des chrétiens eux-mêmes, le langage de la foi s’est codifié dans les mots compliqués des philosophes et des théologiens, au point de devenir obscur. Le résultat, c’est qu’on ne sait plus très bien ce que veut dire être chrétien, et l’on croit qu’il suffit de croire que Dieu existe pour l’être. C’est Louis de Funès qui, à ma connaissance, a dit de la plus belle manière ce que veut dire être dans le Christ et en Dieu, quand il disait du Christ qu’il était pour lui le compagnon radieux de ses jours. Être en Dieu, être dans le Christ, c’est laisser du temps à Dieu dans notre vie, c’est y laisser du temps pour l’évangile, pour la prière, pour qu’ils transforment peu à peu notre manière d’être et de penser.
Cette nouvelle manière d’être, c’est celle qui consiste à être fidèle à ses commandements, comme dit Jésus, les commandements qui se résument à l’amour de Dieu et du prochain. Il s’agit d’un commandement, parce que l’amour ne va pas de soi. Il ne se résume pas au sentiment amoureux, comme on aurait parfois tendance à le croire. Il est la mesure de tout, il place les autres à pied d’égalité et de dignité, il rend le témoin du Christ doux et respectueux, comme dit l’apôtre Paul.

Le champ d’activité de notre amour est en réalité gigantesque. Il commence bien sûr chez nos proches, que nous n’aurons jamais fini d’apprendre à aimer comme le Christ les aime. Mais il y a aussi un esprit d’amour à insuffler partout dans nos relations sociales et dans la manière dont s’organise notre société. Il me semble que les « indignés » de la Plaza del Sol de Madrid et d’ailleurs en Espagne et en Grèce, adressent au monde un message important : la vie sociale ne peut pas s’organiser, simplement en mettant en concurrence les individus, les entreprises, les assurances sociales et la fiscalité entre les pays du monde. Si le pays le plus merveilleux devient celui où il y a le moins de protection sociale et le moins d’impôt, alors les pauvres et les plus faibles paient la note du déficit d’humanité. Personne ne peut être heureux tout seul. Nous avons besoin les uns des autres, besoin que les autres soient heureux, pour que nous puissions l’être nous-mêmes. Pour humaniser le monde, la concurrence doit s’effacer devant la collaboration et la solidarité.  Nos visions du monde doivent passer par la lorgnette de l’amour des autres, cette lorgnette qui se règle sur l’évangile du Christ.

« Vous êtes un doux rêveur », me direz-vous ! Mais n’est-ce pas justement le rêve qui manque aujourd’hui à tant de personnes, et l’évangile n’est-il pas à même d’ouvrir à notre monde un autre horizon que celui d’une croissance destructrice du don que Dieu nous fait de sa création ?

Le Défenseur, l’Esprit de vérité, il nous revient en premier à nous, chrétiens, de le demander, de l’accueillir, tout particulièrement à l’approche de la Pentecôte, pour que se réalise notre vocation à être les ardents défenseurs de la dignité des humains. Simplement parce que tous sont aimés de Dieu, parce Dieu est en eux, et que nous sommes appelés à former avec eux tous la grande famille des enfants de Dieu, dans laquelle personne n’est orphelin. – Amen.

 

 

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