Messe du 4e dimanche de l’Avent

 

Abbé Jean-Marie Pasquier, à l’église du Saint-Rédempteur, Lausanne, le 22 décembre 2002.

Lectures bibliques : 2 Samuel 7, 1-7; Luc 1, 26-38

Marie, demeure de Dieu parmi les hommes

Depuis quatre semaines, nous nous posons une double question : Dieu a-t-il un avenir dans notre monde moderne ? Et : y a-t-il un avenir crédible pour l’homme d’aujourd’hui ?

Vous connaissez sans doute le vers d’Aragon chanté par Jean Ferrat : « La femme est l’avenir de l’homme. » Et si la femme était aussi … l’avenir de Dieu ! Un lieu où Dieu trouve enfin à s’établir, où il se sent accueilli totalement, sans réserves, où il pourra demeurer en plénitude, occuper toute la place. Une personne dont il pourrait enfin faire sa demeure parmi les hommes.

Elle est longue l’histoire de Dieu en quête de domicile sur notre terre. Il a commencé par partager la vie nomade de son peuple au désert où il a vécu sous la tente, en déplacements continuels, au risque même d’être oublié par la caravane. Arrivé en Canaan où le peuple va se sédentariser, Dieu résistera longtemps au désir de son peuple de lui construire une maison en dur, sachant bien la fragilité et l’ambiguïté des temples terrestres. A David, honteux d’habiter un palais en bois de cèdre, alors que Dieu est encore sous la tente, le Seigneur fait savoir que c’est Lui, Dieu, qui lui fera une maison et non l’inverse. Non une maison de pierres, mais une maison constituée de personnes, de pierres vivantes, c’est-à-dire une famille, une descendance. Et dans cette maison, c’est Lui le Seigneur, qui sera le Père. Et l’homme sera pour Lui un fils. Le fils de David pourra dire à Dieu : « Tu es mon Père », jusqu’au jour où tous les enfants de ce peuple et tous les peuples de la terre pourront dire à Dieu : « Tu es notre Père. »

Mais encore une fois : où trouver dans ce monde la famille humaine capable d’accueillir un tel fils ? Où lui trouver une mère, une femme, assez petite et assez grande pour accueillir en elle le fils du Très Haut, pour devenir en sa chair le nouveau trône de David, la nouvelle arche d’alliance, pour devenir la mère du fils de Dieu ?

Nous savons maintenant que cette femme existe : c’est une jeune fille de Nazareth, Marie, fiancée à un homme de la maison de David. Et surtout, une femme totalement ouverte à l’imprévisible de l’avenir de Dieu. Un avenir qui surprend et dépasse tous les pronostics humains. C’est pourquoi l’ange de l’Annonciation peut lui dire : « Réjouis-toi, comblée de grâce. » Tu es la toute gracieuse, la toute belle, de la beauté même de Dieu. Et tu es la pleinement graciée, car Dieu t’a fait grâce, il t’a aimée. Tu es, lui dira sa cousine Elizabeth, « bénie entre toutes les femmes », heureuse entre toutes d’avoir cru que se réaliserait la Parole du Seigneur. Oui, la petite servante de Nazareth est grande et admirable pour avoir cru en cette réalité de l’avenir de Dieu dans son être de femme et de mère. Ce n’est pas évident, pourtant. « Comment cela se fera-t-il ? » demande-t-elle. Vous avez entendu la réponse de l’ange, à propos de la maternité d’Elizabeth la stérile : « Rien n’est impossible à Dieu. »

Dès lors, la maison de Dieu parmi les hommes, c’est elle : son corps, sa vie dans la maison de Nazareth où Jésus grandira et apprendra à habiter parmi nous. Pour demeurer à jamais dans la maison humaine.

Comment cela serait-il possible sans l’accueil, sans la foi, sans l’amour de la femme ? L’histoire de Marie de Nazareth se continue dans celle de tant de femmes qui ont cru et aimé comme elle. Toutes ces femmes, jeunes ou plus âgées, qui sont nos mères, nos sœurs, nos épouses, nos filles, femmes de tous les continents, de toutes les cultures et religions. Femmes aimées et femmes méprisées. Femmes croyantes, engagées en Eglise ou déçues de leur Eglise. Heureuses êtes-vous si vous croyez, si vous espérez, si vous aimez, malgré tout. Vous êtes l’avenir de l’humanité et l’avenir de Dieu dans ce monde.

Et l’Eglise, Epouse du Christ et servante du Seigneur ? Comment poursuit-elle, à la suite de Marie, et avec elle, son pèlerinage de la foi à travers l’histoire ? comment voit-elle l’avenir ?

Selon les sociologues et leurs statistiques, l’avenir de l’Eglise dans notre vieille Europe demeure incertain et même inquiétant. La courbe des pratiquants et des vocations continue de descendre, si c’est encore possible. Le nombre des adeptes diminue. Devant de telles perspectives, on peut paniquer… ou se résigner. Mais on peut aussi réentendre la parole de l’ange : « N’aie pas peur… l’Esprit viendra sur toi… Rien n’est impossible à Dieu. »

Jésus, qu’on a appelé « le maître de l’impossible », reprendra cette parole, en positif. Au malade qui doutait de son pouvoir de guérison, il répond : « Tout est possible à celui qui croit ». Voilà que la balle est à nouveau dans notre camp. Est-ce que tu crois ? Est-ce que nous croyons à l’avenir de Dieu au milieu de nous ?

Le Seigneur vient bientôt. Il est à nos portes.
Sa venue est certaine, mais elle dépend aussi de nous. Amen
Prière

Seigneur,
Te voici maintenant tout près de nous.
Longtemps, tu as cherché ta place dans la caravane humaine.
Tu la trouveras dans la crèche de Bethléem et dans la maison de Nazareth.
Mais surtout tu l’as trouvée dans le cœur de Marie, la Vierge Mère.
Puisse-tu la trouver aussi dans chacune de nos maisons,
dans chacune de nos vies,
à l’intime de notre cœur.

 

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