Messe du 3ème dimanche de Pâques

 

Abbé José Fernandez , à l’église Saint-Amédée, Lausanne le 22 avril 2007
Lectures bibliques :
Actes 5, 27-41; Apocalypse 5, 11-14; Jean 21, 1-19 – Année C

 

Un petit enfant de 6 ans, Benoît, disait un jour à sa grand-maman : « Mamie, tu es vieille ! – Oui, mon chéri. – Alors tu vas bientôt aller au ciel ! » Le grand-père qui écoutait la conversation fronça les sourcils pour dire aussitôt : « Mais tu sais, elle n’est pas pressée d’y aller, et moi, j’aime mieux qu’elle attende un peu. » Et la grand-mère de préciser à son petit-fils : C’est vrai, j’irai bientôt au ciel, c’est tellement beau de rencontrer Jésus. Mais tu vois, ton grand-père a aussi raison : je ne peux pas le laisser trop vite, ni toi d’ailleurs, tu as encore un peu besoin de ta mamie, non ? ».

Eh bien, frères et sœurs, chers amis et auditeurs, les apôtres de l’évangile de ce dimanche sont un peu, me semble-t-il, comme cette mamie : comme elle, ils voudraient bien rejoindre Jésus. Il est maintenant sur cette autre rive – entendez la rive de l’Eternité. C’est le Christ ressuscité. Mais en attendant, ils savent – d’ailleurs nous savons nous aussi que si le Christ est déjà dans la gloire, nous il y a des jours où il nous faut continuer à ramer dur sur cette mer agitée de nos vies quotidiennes et du monde dans lequel nous sommes.

Certains estiment peut-être que Dieu là-haut contemple tranquillement les nuages et les étoiles et toute sa création… Oui, c’est vrai, il connaît certainement cette joie formidable d’une vie trinitaire, d’une intimité avec son Fils et dans l’Esprit, mais il n’est pas indifférent aux hommes. Comme Jésus, lui, sur la rive, n’a pas oublié la préoccupation de ses frères, de ses disciples qu’il avait choisis. Tout cela pour nous dire que nous ne sommes pas seuls. La Résurrection, ce n’est pas l’abandon de la part de Jésus.

Il y a déjà eu, vous vous en souvenez peut-être, une première pêche miraculeuse. A l’époque, Jésus était dans la barque. Aujourd’hui, il est sur la rive. Il n’est plus de cette terre, il a atteint le rivage solide, définitif de l’éternité. Mais nous n’avons pas affaire ni à un fantôme quelconque, un ectoplasme, ou je ne sais quelle hallucination de la part des disciples. Parce que sur le rivage, et c’est là notre foi, notre assurance profonde c’est que sur ce rivage, il y a un Vivant, l’un d’entre nous. Ils ne l’ont pas reconnu au premier abord, mais ce n’était pas une hallucination, c’était bien une personne en chair et en os – si j’ose le dire ainsi !

Et que fait Jésus sur cette rive ? Il les appelle : Auriez-vous quelque chose à manger ? Comme s’il ne savait d’ailleurs qu’ils n’avaient strictement rien pris ! (Dieu a de l’humour et nous le savons !). Mais lorsqu’il nous demande un peu qqch, c’est pour tjs nous donner davantage.

Pour que les Apôtres comprennent, le reconnaissent, ils auront eu besoin d’indices, non pas de preuves. Ils auront jeté, le filet, ils auront obéi à la parole du Seigneur. Comme de bons pécheurs, ils ont accompli la parole du Seigneur. Il en aura fallu encore un second : il faudra encore que le filet se remplisse de 153 gros poissons pour que nous obtenions cette profession de foi du disciple que Jésus aimait : « c’est le Seigneur ! ». C’est un peu comme pour les disciples d’Emmaüs, il aura fallu que Jésus rompe le pain pour qu’il soit bel et bien reconnu : « Notre cœur n’était-il pas tout brulants lorsqu’il nous parlait ». Mais il aura fallu ce signe de la fraction du pain.
Mais ce filet est aussi à mes yeux un très beau signe : il aura fallu que la barque avec son filet plein de gros poissons regagne la rive. Il y en avait, dit l’évangéliste, 153. Il aura fallu que la barque regagne la rive de l’éternité, avec son filet plein de poisson, comme pour nous dire, frères et sœurs, que si l’Eglise dans laquelle nous vivons aujourd’hui parfois écartelée, à certains moments même disloquée, atteindra un jour le rivage divin avec ce désir de Dieu d’être plein de tous les gros poissons que nous sommes – et il ne devra pas, tel est le désir de Dieu, qu’un seul manque ! Il ne faudra pas passer entre les mailles du filet ; nous ne pourrons pas passer entre les mailles du filet, parce qu’il y aura une parole – et c’est peut-être la seule qu’il nous faut retenir de l’évangile d’aujourd’hui : il y aura une seule parole qui nous aura comme pêchés ou repêchés et c’est celle que Jésus adresse aujourd’hui à Pierre et donc à chacun d’entre nous. Pierre, il lui aura fallu trois fois, nous le savons, dit la Tradition de l’Eglise, comme pour racheter son triple reniement. Mais pour nous, trois fois seront-ils suffisants ? Peut-être pas… peu importe…

Mais Pierre m’aimes-tu ? Cette parole qu’il adresse à chacun d’entre nous.
« M’aimes-tu plus que ceux-ci ? » Cette parole qui est adressée à chacun de nous et cette réponse qui appartient à chacun de nous, à vous comme à moi : « Seigneur, tu sais tout. Tu sais bien que je t’aime. »
Amen.

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *