Messe du 31e dimanche ordinaire

 

Abbé François-Xavier Amherdt, chapelle de l’Institut Ste-Ursule à Fribourg, le 5 novembre 2006
Lectures bibliques : Deutéronome 6, 2-6; Hébreux 7, 23-28; Marc 12, 28-34 – Année B

INTRODUCTION

Quelle joie pour nous, étudiants, professeurs, intervenants, membres de la direction de l’Institut Romand de Formation aux Ministères et de l’année de formation biblique, théologique et spirituelle Croire & Comprendre de vous rejoindre, avec nos familles, par le biais des ondes !
Nous nous réjouissons d’autant plus de pouvoir apporter notre témoignage eucharistique et radiophonique que cette messe s’inscrit au cœur de l’année 2006 des vocations laïques, religieuses et diaconales en Église.

A. L’ACCORD DIVIN

1. INTRODUCTION : TROIS SONS – UN ACCORD

Lorsque la cithare de notre étudiante Erika se met en mouvement, les cordes pincées bâtissent des accords, do – mi – sol, ré – fa – la, majeurs ou mineurs. Il ne faut que trois sons, parfois répétés, pour que l’harmonie se dégage. Trois notes distinctes, un seul accord. Mais il convient que les trois sons soient justes pour que l’harmonie s’établisse. Il suffit qu’un des trois soit faux, pour que l’accord tout entier sonne horriblement mal. Et cela, même si les deux autres notes sont accordées.

DO, la tonique qui donne le ton, la tonalité, le nom de l’accord. et qui porte l’édifice sonore.

SOL, la dominante qui coiffe l’ensemble, à la quinte, et stabilise la vibration.

Et MI, la troisième note dite tierce, majeure ou mineure, qui apporte à l’accord sa touche finale et le spécifie.

Une tierce majeure donne un accord majeur, do – mi – sol. Une tierce mineure, un accord mineur, do – mi bémol – sol.

C’est comme pour un triangle équilatéral : deux côtés auraient beau être de même longueur, si le troisième angle cloche, c’est toute la figure qui est modifiée. De même un tabouret à trois pieds ou trépied : une seule jambe est bancale et tout le tabouret est déséquilibré.

2. LA TRINITE : UN ACCORD EN TROIS SONS

Ainsi en va-t-il, si j’ose projeter sur lui cette humble comparaison humaine, de notre Dieu, unique, en trois personnes. Un seul Seigneur, une seule harmonie divine, un unique accord parfait, et pourtant trois personnes, trois notes distinctes, le Père, le Fils, l’Esprit Saint.
Un ajustement parfait entre eux, le Père aimant le Fils, le Fils se laissant aimer par le Père, en cet amour commun aux deux qu’est l’Esprit. Vivement l’éternité, que nous leur soyons pleinement accordés !

B. UN AMOUR TRINITAIRE

3. UN TRIPLE COMMANDEMENT

Mais nous pouvons déjà anticiper cette plénitude définitive de l’au-delà par notre amour ici-bas. Nous sommes conviés à répercuter l’amour trinitaire dans notre manière d’être terrestre. En un amour à trois sons, comme un accord à trois notes : l’amour de Dieu ! « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit, de toute ta force, les quatre dimensions constitutives de l’anthropologie biblique, cœur, âme, esprit et force corporelle ; l’amour du prochain, quel qu’il soit ; l’amour de soi-même, avec autant d’intensité que les deux autres. »

C’était déjà le commandement du Deutéronome, au centre de l’Ancien Testament. « Écoute Israël, le Shema Israël. Écoute et mets en pratique. Écoute, répète et chante-le de tout ton être. Mets Yahvé l’Éternel, le Dieu de tes pères, au-dessus de tout. Ne va pas te disperser à courir après les idoles, les fausses divinités, l’argent, la gloire, le pouvoir, les biens matériels, ce qui attire spontanément ton regard. Mise sur l’essentiel, ton unique trésor. Mets-y ton cœur et ton énergie, et tu seras juste, ajusté et heureux. »

4. LE CŒUR DU NOUVEAU TESTAMENT

Jésus reprend le précepte de l’Ancien Testament dans sa réponse au scribe, ce spécialiste de la Loi. Il se met sur le même terrain que lui, il s’ajuste à son interlocuteur, pour ce questionnement qui occupait bien des écoles rabbiniques de son époque : « Quel est le premier de tous les commandements ? » Quelle est la clé, au début de la portée des cinq lignes de l’existence, qui donne leur hauteur à toutes les notes du quotidien, comme dans l’écriture musicale ? La clé de sol ? La clé de fa ? La clé d’ut ? Une autre clé ? Quel est ton paradigme ? Ton référentiel ? Ton système repère ? « Tu aimeras le Seigneur, tonique, DO ».

Mais Jésus va plus loin. Il y ajoute un double commandement, présent aussi dans l’Ancien Testament, dans le Livre du Lévitique, dont il dit qu’il équivaut au premier : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Rien de plus haut. C’est le cœur de son message, de son Incarnation, la raison de sa venue parmi les hommes, la clé de son mystère, le sens de la volonté du Père, la direction donnée par le souffle de l’Esprit.

Aimer l’autre, celui qui, de suite, me fait bonne impression, celle qui me plaît au premier coup d’œil, comme celui qui me semble acariâtre et compliqué, celle qui me laisse une impression mitigée et qui paraît d’une autre planète, ceux qui ne pensent pas comme moi, celles qui sont d’un autre parti, d’une Église séparée, d’un autre pays, d’une religion différente. Deuxième note, également essentielle, dominante, SOL, de « Dominus », Seigneur, qui donne Dominique et dimanche, « dominica dies ». Tu aimeras celui qui est l’icône de ton Seigneur, ton prochain proche et lointain. Si tu dis aimer ton Dieu et que tu critiques ton frère, tu es menteur.

Et le Christ ajoute, audace suprême, de grande valeur humaine et psychologique, « comme toi-même », troisième note, tout aussi indispensable, tierce majeure et mineure, MI de l’accord évangélique, l’amour de soi. Bien sûr, pas dans le sens d’une recherche égoïste d’un épanouissement nombriliste de mon petit MOI érigé en divinité. Mais cet amour de moi, à développer, ce moi à cultiver par bien des procédures de développement personnel, ce moi, tel qu’il est, avec ses parts d’ombres et de lumière, ce moi, à accueillir tel qu’il est, puisque c’est ainsi que je suis aimé de Dieu, ce moi à travailler, dans l’énergie de l’Esprit, ce moi à oublier lorsqu’il se fait boursouflé. Pour l’insérer dans l’accord. Ce troisième amour manque-t-il ? L’harmonie est prétéritée. Un autre amour fait-il défaut ? Le triangle de l’existence disparaît. Une autre note est-elle désaccordée. Le trépied boîte.

C. TROIS LETTRES

5. IFM

Trois commandements, qui n’en font qu’un. Valable pour chacun de nos auditeurs, pour les malades et les personnes âgées, si précieuses au cœur de Dieu, comme pour tout membre de la communauté de l’IFM. Ne serait-ce pas d’ailleurs un clin d’œil symbolique de la Providence que notre sigle, unique, soit lui aussi composé de trois lettres ? Un seul sigle, trois lettres IFM.

I, comme Institut, mais aussi comme Individu, au sens où la formation que nous offrons est fortement individualisée : chaque candidat est discerné dans sa personnalité, sa motivation et sa vocation, puis envoyé à l’IFM par son vicariat cantonal ou diocésain. On ne s’inscrit pas de son propre chef à l’IFM, on y est mandaté, on y est appelé. Année des vocations. Puis chacun des étudiants fait son parcours particulier, avec un ministère et un stage pratique spécifique, dans une communauté ou un service donné, en étant suivi par un maître de stage, mais aussi un conseiller d’études pour les cours, sessions, examens, séminaires et travaux écrits, et par un accompagnateur spirituel pour son chemin devant Dieu.

Puis F, deuxième note, dominante, F comme Formation, Institut romand de Formation, mais aussi F comme Fraternité, cette vie communautaire que nous essayons de tisser entre nous à l’Institut, malgré ou plutôt grâce à la diversité des uns et des autres, dans les temps de repas, de prière, de célébration, de partage, pour que la Parole circule, soit vécue et fêtée. Et cela ne fonctionne ma foi encore pas si mal, aux dires des étudiants.

A l’image de l’Église communion, une et pourtant si plurielle et multicolore. Comme un unisson qui se fait polyphonique par la grâce du canon.

Enfin M, troisième note, comme Ministères, mais aussi comme Merveilles de Dieu, « Mirabilia Dei », la tonique, notre unique nécessaire, ce Seigneur au nom duquel nous sommes rassemblés des sept coins de la Romandie, qui seul mérite notre investissement.

Ce Dieu qui nous comble en cette année des vocations avec nos dix-neuf nouveaux de l’IFM, les auditeurs et auditrices libres, et tous les candidats de Croire & Comprendre.

A lui notre amour total, corps-force, cœur-volonté, âme-intériorité et souffle-esprit.

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *