Messe du 2e dimanche du temps ordinaire


Chanoine Yannick-Marie Escher, à l’abbaye de Saint-Maurice, le 14 janvier 2007
Lectures bibliques : Isaïe 62, 1-5; 1 Corinthiens 12, 4-11; Jean 2, 1-11 – Année C

Mes frères, mes sœurs,

 

Le chapitre deux de l’Evangile de Jean nous montre Jésus et les cinq premiers apôtres (Jean, Simon-Pierre, André, Nathanaël et Philippe) invités à une noce à Cana de Galilée près de Nazareth où vit la Vierge Marie. L’invitation selon la coutume, comprenait les amis de celui qui en était l’objet : donc puisque Jésus était invité avec sa mère à cette fête, il y entraîna son petit groupe d’amis. Toujours selon la coutume, la fête durait une semaine, On devait se préoccuper d’avoir du vin en suffisance, car à cette occasion on en buvait abondamment, et l’on peut comprendre dans notre cas, l’embarras du maître quand le vin vint à manquer. C’est alors que Jésus réalise son premier signe en changeant l’eau des six cuves d’ablution en excellent vin.

Le miracle des noces de Cana est une des pages les plus révélatrices de la conception que Jésus a de la vie : quel que soit l’aspect de l’existence – le plus banal même – il est digne d’être relié à Jésus et d’être le lieu de son intervention. En effet, Jésus sait, dans l’humanité, reprendre tout ce qui est à lui, respecter tout ce qui est légitime. Sa présence sanctifie tout : relations, sentiments, joies ; rien d’humain ne lui est étranger. Or, trop souvent nous croyons que Dieu est « étranger » à notre vie quotidienne, qu’il serait uniquement présent dans nos églises de pierres. Ce matin, nous sommes appelés à prendre le même chemin que les disciples qui ont suivi le Christ et vécu le miracle de Cana : Cana c’est chaque jour.

Oui, dans nos vies il manque aussi du vin, de ce vin qui est dans la Bible le symbole de l’amitié, de l’amour et de la joie. Notre quotidien ressemble souvent à cette eau insipide et sans grande signification que l’on pouvait trouver dans les six cuves de pierre de Cana. Seule la rencontre authentique avec le Christ peut transformer intérieurement notre travail, nos joies et nos peines. Pour opérer ce miracle aujourd’hui, le Christ ne demande rien de plus qu’à Cana. Il nous demande seulement d’accomplir nos tâches quotidiennes « jusqu’au bord », c’est-à-dire parfaitement ; alors il pourra opérer un miracle. Si ceux qui travaillent dans les campagnes ou dans les écoles, les collèges et les universités, dans les hôpitaux ou au foyer, dans les usines et dans les banques, dans le monde des arts et des loisirs… si tous ceux-là faisaient leur travail aussi bien que possible, avec un cœur sincèrement chrétien, nous serions alors dans le monde nouveau ! En effet, Notre Seigneur transformera en très bon vin ces œuvres qui nous semblent parfois bien vaines et stériles. Le monde connaîtra alors cette fête nuptiale décrite dans la première lecture : « Les nations verront ta justice, tous les rois verront ta gloire. On t’appellera d’un nom nouveau, donné par le Seigneur lui-même. Tu seras une couronne resplendissante entre les doigts du Seigneur, un diadème royale dans la main de ton Dieu » (cf. Is 62, 1-5)

Le Seigneur nous invite aujourd’hui à remplir d’eau les cuves, à ne pas laisser la routine, l’impatience, la paresse, la négligence négliger « l’eau » sans valeur de notre quotidien car il en a besoin pour en faire « le vin » de l’alliance éternelle. Le prêtre ne dit-il pas à l’offertoire : « Tu es béni, Dieu de l’univers, toi qui nous donnes ce vin, fruit de la vigne et du travail des hommes ; nous te le présentons : il deviendra le vin du Royaume éternel. » ? Comme le dit fort justement saint Augustin : « ce qui est célébré sur l’autel, c’est notre mystère », d’où cette sobre exultation du psaume 65 que nous méditerons avec le chant grégorien à l’offertoire : « Acclamez Dieu, toute la terre, oui acclamez Dieu, toute la terre ; chantez en l’honneur de son nom ; venez, écoutez, vous tous qui craignez le Seigneur, et je vous raconterai les merveilles que le Seigneur a faites pour moi. Alleluia ! »

Nous pouvons maintenant nous tourner vers le Seigneur et reprendre la prière d’ouverture de cette célébration : « Dieu éternel et tout-puissant, qui régis l’univers du ciel et de la terre : exauce, en ta bonté, les prières de ton peuple et fais à notre temps la grâce de la paix. » En demandant la grâce de la paix, nous demandons que le Christ l’établisse d’abord en nos âmes. Alors s’il y a chez nous des vases remplis de paix, il y puisera pour la répandre sur le monde qui en a tant besoin. Soyons donc des instruments de paix, la grâce de Dieu transformant nos vies. Sachons donc grandir peu à peu, comme les disciples qui « crurent en Lui » après le miracle de Cana. On pourrait être étonné de cette remarque de l’Evangéliste. En effet, les disciples n’avaient-ils pas déjà « cru en lui » ? Mais, nous connaissons tous ce phénomène dans les relations humaines. Il nous faut fréquenter une personne, passer du temps avec elle, de façon répétée si nous voulons la connaître toujours mieux. Il en va de même avec Jésus qui nous transforme petit à petit chaque jour.

 

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