Messe du 2e dimanche de l’Avent

 

 

 

Abbé Michel Salamolard, église Sainte-Catherine, Sierre, le 10 décembre 2000

Lectures bibliques : Baruch 5, 1-9; Philippiens 1, 4-11; Luc 3, 1-6

Bâtir une civilisation de l’amour
Dieu conduit l’histoire à sa façon : la mondialisation de l’amour

Dans l’évangile d’aujourd’hui, Luc semble dérouler le tapis rouge aux grands de ce monde. L’empereur, Tibère; un gouverneur, Ponce Pilate; des princes, Hérode, Philippe et Lysanias; des grands prêtres, Anne et Caïphe…
S’il écrivait aujourd’hui, Luc parlerait sans doute de présidents, de rois et de reines, d’empereurs de la finance. Ces gens semblent mener le monde et tenir notre destinée entre leurs mains. Mais sont-ils vraiment les maîtres de l’histoire ?
Et Dieu, que fait-il dans tout cela ? Est-il le grand absent de l’univers ? Où est sa toute-puissance, face au pouvoir des armes et de l’argent ? Où est sa toute-puissance, quand tant d’hommes et de femmes sont opprimés, quand des enfants sont exploités et massacrés ? En cette journée internationale des droits de l’homme, ces questions s’imposent à nous avec intensité.
Mais revenons à l’évangile. Brusquement, nous voyons disparaître tous les dirigeants et potentats. Comme s’ils n’étaient, au fond, que des seconds rôles.

La parole de Dieu fut adressée dans le désert à Jean, fils de Zacharie. Dieu parle, Dieu intervient. Mais – surprise ! – il ne joue pas dans la cour des grands. Sa parole retentit, non dans un Conseil des ministres, mais au désert. Elle est confiée à un homme dépouillé, marginal et sans pouvoir.
Le même scénario se répétera à Noël. De nouveau, Luc établira un contraste saisissant entre les puissants de ce monde et un petit enfant, un fils de pauvres, couché dans une mangeoire, en qui Dieu se rend présent.
Qu’est-ce que tout cela signifie ? Une chose très simple. Il y a deux façons de mener l’histoire. La première est celle du pouvoir. Elle suscite la peur et s’impose par la force : force de la loi, force de l’argent, force des militaires ou des terroristes.

La seconde façon d’agir est celle de l’amour. Elle suscite la liberté, elle s’impose par la douceur, l’humilité, le service, la joie partagée.
Entre les deux, Dieu a fait son choix. A vrai dire, ce n’est pas un choix. C’est une évidence, cela coule de source. Dieu est un réservoir d’amour, infini, débordant, inépuisable. Cet amour, Dieu est impatient de le communiquer. A tous. Son projet, c’est la mondialisation de l’amour.

Impossible d’imposer un tel projet par force, l’amour est libre. Impossible de le réaliser à coups de millions, l’amour ne s’achète pas. Dieu n’a qu’une solution : toucher les cœurs. Mais comment les toucher tous ?
Dieu est génial. Il a inventé deux trucs, si je puis dire. Le premier, c’est de donner la priorité aux pauvres, aux petits, aux derniers des derniers. Dieu va d’abord aux oubliés du monde. Il sait que si le dernier est rejoint, les autres le seront aussi.
Et pour être sûr de toucher le tout dernier, Dieu va se mettre lui-même au bas de l’échelle. Ainsi, il n’écrasera personne, ne fera peur à personne. Dieu va se loger au fin fond de notre pauvreté, de notre petitesse – c’est la crèche et c’est la Croix – et son amour montera de là, comme une sève, pour se répandre dans le grand arbre de l’humanité.

Le second truc de génie que Dieu a inventé, c’est la contagion de l’amour. Un jour, Jésus disparaît. Il remonte vers son Père, comme on dit. Mais ce n’est pas pour s’absenter, c’est pour multiplier sa présence d’amour. Il répand son Esprit dans les cœurs qu’il a touchés. Et ces cœurs deviennent brûlants comme le sien. Ils vont à leur tour toucher d’autres cœurs. Et l’amour de Dieu se propage comme un feu de forêt. De cœur en cœur, il incendie le monde.
Cette mise en réseau des cœurs touchés par Dieu, c’est l’Église, toujours plus vaste que ses frontières visibles. En font partie, d’une manière ou d’une autre, tous ceux et toutes celles qui s’efforcent d’aimer à la manière de Dieu.
Nous en sommes aussi, dans la mesure où nous ouvrons notre cœur à Dieu, afin qu’il puisse l’ouvrir aux autres.
Chers amis, demandons à Dieu qu’il touche notre cœur, qu’il nous inscrive profondément et pour toujours dans son réseau à lui, afin que l’amour circule à travers l’espace et le temps, et qu’il atteigne tous les hommes. Que notre cœur à tous devienne un foyer brûlant, contribuant jour après jour à la mondialisation de l’amour.

Amen.

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