Messe du 2e dimanche de l’Avent

 

Abbé Jean-Marie Pasquier, à l’église du Saint-Rédempteur, Lausanne, le 8 décembre 2002.

Lectures bibliques : Isaïe 40, 1-11; 2 Pierre 3, 8-14; Marc 1, 1-8

Où trouver le vrai visage de Dieu ?

Nous croyons que Dieu vient à notre rencontre, mais comment le reconnaître ? Sans parler de la multitude des dieux que nous proposent aujourd’hui les différentes religions du monde, combien d’images de Dieu se bousculent devant nos yeux au sein même de la chrétienté ? Et combien de visages de Dieu ont défilé dans nos petites têtes depuis notre enfance ? Les plus anciens se souviennent encore de ce Dieu juge qui voit tout, qui sait tout, à qui nous aurons à rendre compte. On a heureusement redécouvert le visage d’un Dieu Père et Mère, qui est tout amour et miséricorde. Au risque de basculer, à l’autre extrême, dans les bras d’un grand papa gâteau, et même un peu gâteux, qui ferme les yeux et laisse tout passer. Alors, quel est pour moi le vrai visage du Dieu qui vient nous sauver ?

Ne pensons pas qu’il suffira de cliquer sur « Bible » ou même « Evangile » pour voir apparaître sur notre écran l’authentique visage du Dieu révélé par les Écritures. Un Dieu prêt-à-porter et qui ne changera plus. Relisons le prophète Isaïe entendu tout à l’heure. Lui-même nous présente deux images superposées de Dieu qui paraissent difficilement conciliable : un Dieu qui vient avec puissance, tel un chef de guerre qui rentre victorieux de sa campagne, et sitôt après un Dieu berger qui rassemble son troupeau, qui porte les agneaux plus faibles dans ses bras et sur son cœur, comme une maman. Ne choisissons pas trop vite entre ces deux images : la puissance victorieuse et l’humble tendresse. Et si Dieu était les deux à la fois ? Et si sa toute-puissance résidait justement dans son infinie tendresse, et si ses victoires n’étaient autres que celles de son amour ? C’est un écrivain non croyant, Albert Camus, qui a pu écrire : « La gloire, c’est de pouvoir aimer sans mesure. » Il disait cela de l’amour humain fulgurant qu’il vivait alors, mais à combien plus forte raison peut-on le dire de l’amour de Dieu qui sera toujours au delà de ce nous pouvons imaginer.

Relisons le psaume d’aujourd’hui : « J’écoute, que dit le Seigneur Dieu ? » (psaume 84). Un hymne magnifique à ce Dieu toujours plus grand qui dépasse, en les unissant en lui, ces valeurs que l’on oppose si souvent, comme si l’une faisait concurrence à l’autre.

Souvent on entend dire : « L’amour oui, mais attention, dans la vérité ». Que dit le Seigneur Dieu ? « Amour et vérité se rencontrent ». L’amour de la vérité, bien sûr, mais sans oublier que le dernier mot de la vérité de Dieu, c’est l’amour.

Nous disons souvent : « La paix, d’accord, mais pas sans la justice, pas dans l’impunité. Rétablissons d’abord la justice. » Que dit le Seigneur Dieu ? « Justice et paix s’embrassent. » On ne peut pas les séparer. Pas de paix sans justice, c’est vrai, mais comme nous le rappelait Jean-Paul II au début de cette année, il n’y a pas non plus de vraie justice sans pardon, sans qu’on se réconcilie, sans qu’on fasse la paix.

On dit encore : « La terre, oui, c’est important, mais n’oublions pas le ciel. Que l’horizontale ne cache pas la verticale. Que dit le Seigneur Dieu ? « La vérité germera de la terre, et du ciel se penchera la justice ». Les deux bras de la croix, celui qui relie la terre au ciel et celui qui embrasse le monde forment un tout inséparable.

Jean-Baptiste nous dit aujourd’hui, à la suite d’Isaïe : « Préparez le chemin du Seigneur. » C’est donc notre travail, un vaste chantier confié à notre responsabilité. Mais que dit le Seigneur Dieu ? « Mes pas traceront le chemin. » Sur le chemin de la rencontre de Dieu, c’est Lui qui avance le premier, qui fait les premiers pas. Dieu infiniment plus grand que nos schémas, et nos dilemmes, nos doutes et nos certitudes

Se convertir, n’est-ce pas d’abord se retourner vers ce Dieu qui nous dépasse, nous déroute, et nous devance toujours sur le chemin de la rencontre. Parmi les obstacles à renverser pour aplanir la route, il y a sûrement ces images toutes faites de Dieu qui nous empêchent d’avancer dans la liberté des enfants de Dieu. En définitive, la vérité qui nous rendra libres, libres pour croire et pour aimer, libres pour reconnaître et adorer le vrai visage de Dieu, c’est quelqu’un, une personne à accueillir au milieu de nous et en nous. C’est Jésus, qui nous dit lui-même : « Je suis le chemin, la vérité, la vie. » « Qui m’a vu, a vu le Père. » « Nul ne vient au Père que par moi. » Amen.

Prière

Seigneur,
nous croyons que tu viens à nous.
Mais comment reconnaîtrons-nous ton vrai visage ?
Libère-nous des idoles anciennes et modernes
qui nous détournent de toi.
Rappelle-nous qui tu es :
amour et vérité, justice et paix.
Que ton Esprit ouvre nos yeux sur la beauté de ta face !
Qu’il vienne changer nos cœurs
Et préparer dans nos vies le chemin
de Celui qui vient,
ton Fils bien-aimé,
notre Frère et notre Berger.
Amen.

 

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