Messe du 28ème dimanche ordinaire

 

Chanoine Charles Neuhaus, abbaye de Saint-Maurice, le 14 octobre 2007
Lectures bibliques : 2 Rois 5, 14-17; 2 Timothée 2, 8-13; Luc 17, 11-19 – Année C

 

 

« Est-ce que tous les dix n’ont pas été purifiés? Et les neuf autres, où sont-ils? On ne les a pas vus revenir pour rendre gloire à Dieu; il n’y a que cet étranger! » On peut percevoir dans la voix de Jésus une certaine tristesse face à l’indifférence de ces neuf lépreux non reconnaissants.

Aujourd’hui, nous entendons cette parole; aujourd’hui cette parole est proclamée dans le peuple chrétien. Elle m’invite à évoquer l’ingratitude de tant de chrétiens à l’égard de notre Dieu qui répand abondamment ses bienfaits, ingratitude qui est souvent la conséquence de la méconnaissance de la richesse des dons de Dieu. Elle me donne aussi l’occasion de nous redire combien le Seigneur est bon envers notre humanité. Quand allons-nous vers Dieu, pour lui rendre gloire à pleine voix, comme le lépreux qui, voyant qu’il était guéri, reviens sur ses pas.

Mais revenons d’abord à ce miracle de la guérison des dix lépreux. Ce n’est pas banal, ce qui leur arrive : être guéri de cette atroce maladie qu’est la lèpre. La lèpre, lentement, défigure le visage, ronge les membres, exclut le malade de toute relation avec ses proches, avec la communauté humaine; le lépreux, au temps de Jésus, était socialement un mort.
Les dix lépreux osent venir à la rencontre de Jésus, tout en restant à l’écart, et ils appellent à l’aide. En route pour aller se montrer aux prêtres, ils sont purifiés de cette maladie qui les rendaient impropres à tout contact et même à prendre part à la vie religieuse. Alors vous pouvez vous imaginer ce qu’a été cette guérison, une résurrection.

Cette guérison manifeste l’amour gratuit et généreux de Dieu pour l’homme blessé dans son corps et dans son être profond. Il ne demande pas aux lépreux un certificat de bonnes mœurs; il ne les interroge pas sur leur foi; il entend tout simplement leur appel au secours qui exprime leur détresse, et témoigne de l’espoir qu’ils mettent en Jésus. Ce qui est déjà un début de foi. C’est vraiment extraordinaire ce que Jésus accomplit pour eux. Le Seigneur comble de ses bienfaits ceux qu’il aime.

Quelle bonne nouvelle saurons-nous entendre à partir de cette page d’évangile? Le Seigneur nous comble de ses bienfaits ! A quels signes aurons-nous la grâce de reconnaître et d’accueillir l’action du Seigneur dans nos vies ? En méditant cette semaine cette page d’évangile, tout en vivant mon ministère en paroisse, j’ai beaucoup pensé à la vie sacramentelle dans le peuple de Dieu.

Nos églises ne sont plus fréquentées en nombre, comme par le passé, pour la messe dominicale, c’est un lieu commun de le rappeler. On en conclut, pas toujours à tort, que les chrétiens ne reconnaissent plus, dans la célébration de l’eucharistie, la présence de Jésus qui fortifie notre foi, qui guérit notre tiédeur, qui nous soutient dans les coups durs. Ils ne croient pas que Dieu est toujours à l’œuvre dans l’eucharistie et dans les autres sacrements – pas seulement certes, mais entre autre. Et pourtant les chrétiens sont encore assez nombreux à demander le baptême pour leurs enfants, à les conduire à la première communion, à les pousser à la confirmation. Les jeunes demandent à se marier à l’église parce ça fait plus sérieux. Les familles accompagnent leurs défunts à l’église pour leur offrir des funérailles chrétiennes. Mais voilà, beaucoup de reviennent pas pour rendre gloire à Dieu, pour faire vivre la grâce que Dieu leur a donné gracieusement, par bonté. Est-ce que tous n’ont pas été bénis, sanctifiés, réconfortés. Jésus disait avec une certaine tristesse, en voyant un des lépreux glorifier Dieu à pleine voix: « Est-ce que tous les dix n’ont pas été purifiés? Et les neuf autres, où sont-ils? »

En méditant cette page d’évangile de la guérison des dix lépreux, laissons-nous être invités à reconnaître et à accueillir l’action de Dieu dans nos vies. Et alors nous saurons rendre gloire à Dieu pour les grandes choses qu’il fait dans notre vie, comme Marie dans son Magnificat: « Le Seigneur fit pour moi des merveilles saint est son nom. ».

Il faut donc se rappeler que les signes religieux – en particulier les sacrements – qui jalonnent notre existence, de la naissance à la mort, nous disent que le Seigneur est avec nous pour nous offrir son amour. Cela suppose d’abord que nous adhérions à ce Dieu d’amour, au lieu de se laisser piéger par la légèreté ou la dérision à l’égard de Dieu qu’on peut voir, entendre ou lire parfois dans le monde des médias.

Bien sûr, cette intervention de Dieu et les biens qui en découlent ne sont pas de l’ordre du sensible. Ils peuvent donc paraître comme bien irréels si on ne les accueille pas avec la foi. « Relève-toi et va: ta foi t’a sauvé » dit Jésus au lépreux guéri qui vient se jeter la face contre terre aux pieds de Jésus en lui rendant grâce. C’est en vivant dans l’action de grâce pour l’œuvre de Dieu dans nos vies que nous en ressentirons les effets. Notre vie prendra une autre dimension que celle donnée par un monde qui cherche son bonheur et son chemin de vie uniquement dans les réalités sensibles et provisoires.

Dimanche dernier, saint Paul nous exhortait dans son message à Timothée: « Je te rappelle que tu dois réveiller en toi le don de Dieu que tu as reçu quand je t’ai imposé les mains » N’oublions pas, chers frères et sœurs, ici présents dans la basilique, et vous qui m’écoutez en ce moment à la radio, de rendre gloire au Seigneur pour les signes donnés de sa présence aimante et salutaire; car son amour est de toujours à toujours.

Vous parents, qui avez fait baptiser vos enfants, rappelez-vous que Dieu a dit : « Tu es mon fils, mon bien-aimé, en qui j’ai mis tout mon amour ». Vivre avec votre enfant cette dimension sacrée de son existence c’est l’aimer aussi comme enfant de Dieu.
Vous mariés, qui avez scellé votre union devant Dieu, rappelez-vous devant Dieu et dans l’action de grâce de cet amour fidèle et éternel qui vous a été donné, pour les moments de bonheur et pour les moments difficiles.
Vous qui avez besoin d’aide, de force intérieure, surhumaine parfois, dans la maladie, l’épreuve, rappelez-vous que le Seigneur est à vos côtés dans la prière, dans l’imposition des mains et l’onction d’huile.
Vous qui avez commencé à communier dans l’émerveillement à la première communion, rappelez-vous que Jésus vous offre la grâce de sa présence dimanche après dimanche, dans sa Parole qui nous le fait connaître, comme aujourd’hui, dans le pain de l’eucharistie qui nous unit à lui.
Nous les prêtres qui avons reçu l’imposition des mains de l’évêque pour être envoyés, rappelons-nous avec émerveillement de l’action du Seigneur à travers les qualités et les limites de notre pauvre petite personne.
A la suite du lépreux samaritain, venons nous jeter, la face contre terre, aux pieds de Jésus en glorifiant Dieu à pleine voix. Alors nous entendrons cette parole: « Relève-toi et va: ta foi t’a sauvé »

 

 

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