Messe du 27e dimanche ordinaire

 

 

Abbé Jean-Robert Allaz, à la basilique Notre-Dame, Lausanne, le 6 octobre 2002.

Lectures bibliques : Isaïe 5, 1-7; Philippines 4, 6-9; Matthieu 21, 33-43

Mes frères, mes sœurs et mes amis,

Depuis trois semaines, nous sommes invités à aller à la vigne, au travers des lectures de l’évangile. De plus, c’est de saison, les vendanges battent leur plein dans nos vignobles, du Lavaux, de la Côte et d’ailleurs. Et une fois de plus, à ce lieu de rendez-vous, le Seigneur a quelque chose à nous dire et nous faire comprendre. L’enjeu en est son royaume.

C’est l’époque de la récolte, de la joie de recueillir le fruit de toute une année de labeur. Cet air de fête est à l’image du chant du prophète Isaïe, le chant du bien-aimé à sa vigne. La récolte fait oublier la peine, les inquiétudes, le ciel tant de fois scruté, le gel et ses risques, pourquoi pas les corbeaux et les maraudeurs… Le vigneron est fier et heureux : Viens bon et fidèle serviteur. Cette reconnaissance par rapport à une vie fructueuse, n’est-elle pas la nôtre par rapport à Dieu, si généreux dans sa bonté et si patient dans sa miséricorde ? Ou celle du Christ pour son Eglise ? La variété des cépages n’est-elle pas la diversité des membres de cette Eglise.

Comme dans notre paroisse du Valentin, où tant de cultures, de langues, d’expressions et de visages se retrouvent autour de l’Autel d’un même Seigneur, ou en prières d’intercessions devant la statue de Notre-Dame, à la lumière vacillante des lumignons.

Mais le risque de l’égoïsme nous guette, lorsque nous voulons nous attribuer à nous-mêmes, tous seuls, la satisfaction de la réussite comme si nous avions oublié notre origine à l’image et à la ressemblance de Dieu. L’évangile nous met en garde, en nous faisant rencontrer des vignerons homicides, destructeurs non pas de la vigne, comme peut le faire la nature, mais plus grave encore, de la vie des serviteurs. Alors, nous frisons la vengeance, signe d’une justice, bien humaine… mais bien injuste !

Et voilà que, comme le Seigneur écrit si souvent la vie à travers des lignes courbes, la suite logique, celle de la vengeance, est remplacée par une admirable leçon d’amour. La pierre rejetée par les bâtisseurs devient pierre d’angle de l’édifice : un peu comme si le petit surpassait le grand, le riche s’effaçait devant le pauvre, et comme nous l’avons vu il y a déjà deux semaines, l’ouvrier de la dernière heure recevait le même salaire que celui de la première. Avec Dieu, rien n’est jamais perdu, les drames de la vie n’ont pas le dessus.

Une parabole, c’est plus qu’une leçon de vie, – celle des hommes qui rejoint celle de Dieu -, c’est ce matin une interpellation !

Sommes-nous conscients que par notre baptême, nous sommes les sarments dont le Christ est le cep ? Nos noms sont inscrits dans les cieux, nous sommes connus de Dieu, la vigne préfigure le royaume des cieux.

Que par notre vocation de chrétiens, nous sommes appelés et envoyés à la vigne du Seigneur, celle qui s’appelle notre monde, notre quartier, notre maison, notre paroisse et pour certains, l’hôpital, l’EMS, la prison, pour d’autres le travail dominical ?

Conscients que là où nous vivons, les pierres angulaires sont les signes d’amour partagés avec les plus petits, ceux qui ressemblent au Seigneur : A ce signe, on reconnaîtra que vous êtes mes disciples. Que de pierre notre monde rejette, dans la course à la réussite, nous éloignant de la première béatitude, celle des pauvres de cœurs !

La pierre rejetée, devenue pierre d’angle, n’est-ce pas la préfiguration du triomphe de la Vie éternelle sur la mort, de la paix sur la guerre, de l’amour sur l’égoïsme, de l’espérance sur le découragement ?

Rien n’est impossible à Dieu avait répondu l’ange Gabriel à Marie. Dès lors, tout est possible dans la vigne du Seigneur pourvu qu’il y ait assez de foi et d’amour. Alors, n’ayons pas peur d’aller à cette vigne, avec le Seigneur la vendange sera toujours belle !
Amen

 

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