Messe du 25ème dimanche ordinaire

 

Chanoine François Roten , abbaye de Saint-Maurice, le 23 septembre 2007
Lectures bibliques : Amos 8, 4-5; 1 Timothée 2, 1-8; Luc 16, 1-13 – Année C

 

La parabole évangélique du gérant malhonnête… Sommes-nous concernés par cette parabole ? Je crois qu’en définitive, nous sommes tous des gérants, qui devons agir avec honnêteté.

Gérants de ces biens matériels qui nous appartiennent, que nous gagnons par notre travail; gérants aussi de ces biens spirituels que nous portons en nous, ces talents comme les appelle Jésus, ces dons, ces capacités, ces ressources qui sont en chacun d’entre nous, que nous devons découvrir et faire fructifier. De toutes ces richesses, nous ne sommes pas les maîtres ; elles ne nous appartiennent pas mais font partie de ce bien commun de l’humanité confié à chacun et chacune pour le bien de tous.
Voilà pourquoi la parabole du gérant est aussi pour nous : nous sommes tous les gérants d’une partie plus ou moins grande du bien commun tant matériel que spirituel, un bien commun qui est destiné à répondre à nos besoins vitaux mais aussi à être partagé.

Cependant dans le climat actuel de campagnes électorales qui voient nos partis politiques s’affronter et glaner l’électeur en vue des prochains scrutins, ce n’est pas l’évangile qui a retenu d’abord mon attention mais la deuxième lecture de la lettre de saint Paul à Timothée. Saint Paul y donne des conseils pour prier en énumérant diverses catégories de personnes qui ont besoin de prières, et parmi elles, au premier plan, les chefs d’Etat et tous ceux qui ont des responsabilités, spécialement dans la cité. Ils ont besoin de nos prières – je cite – « afin que nous puissions mener notre vie dans le calme et la sécurité en hommes religieux et sérieux ».

On comprend que Paul fasse prier pour que les chrétiens puisse mener leur vie dans le calme et la sécurité, des conditions nécessaires à toute vie et particulièrement à la vie de l’Eglise ancienne, car, à cette époque, l’Eglise subissait systématiquement la persécution de l’Empire romain. Elle aspirait au calme et la sécurité.
En ces temps, il  n’allait certainement pas de soi de prier pour les dirigeants politiques : prier pour les politiques c’était prier pour les persécuteurs de l’Eglise. En demandant d’intercéder pour les hommes d’Etat de son temps, saint Paul nous rappelle que l’Eglise ne vit pas de vengeance ; au contraire, elle tient à manifester qu’elle n’est pas ennemie ou concurrente de l’Empire et du pouvoir politique ; les chrétiens sont dans le monde et participent à la vie sociale, tout en affirmant et en osant dire ce qu’ils pensent être juste selon leur foi.

Saint Paul demande donc de prier pour les responsables politiques et il précise « [afin que nous vivions] en hommes religieux et sérieux ».

Qu’est-ce qu’un homme religieux ? Qu’est-ce qu’un homme sérieux ?
Je crois que la réponse à ces deux questions se trouve dans les lectures de ce jour qui nous parlent justement d’homme « pas » religieux et « pas » sérieux, soit exactement le contraire de ce qu’il faut être.

L’homme religieux, n’est-ce pas justement celui qui n’agit pas comme les hommes dont parle le prophète Amos dans la première lecture ? Ces mauvais qui écrasent le pauvre, qui trompent, qui amassent l’argent par tous les moyens. Et Amos de mettre cette parole tranchante dans la bouche du Seigneur : « Non, jamais je n’oublierai aucun de leurs méfaits ». Car le Seigneur voit ce que font les hommes ; il voit tout particulièrement ce que vit le plus pauvre ; son amour est en faveur du pauvre, du délaissé, de celui qui n’est pas considéré.

Mes frères, mes sœurs, l’homme religieux, c’est celui qui regarde son prochain avec le regard de Dieu, un regard d’amour. « Ce que vous avez fait au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez fait »…

Voilà pour l’homme religieux ; quant à l’homme sérieux, c’est celui qui n’agit pas comme le gérant trompeur. Celui qui sert avec justice, sans fourberie, qui fait son travail avec dévouement et sérieusement.

Vous allez m’objecter que ce gérant trompeur ne doit pas être si mauvais que cela, puisque le maître fait son éloge… c’est oublier que ce trompeur a été licencié par son patron pour travail malhonnête !
L’éloge concerne uniquement le fait que ce gérant, dans ses malversations, a su utiliser l’argent comme un serviteur ; il a mis l’argent à sa juste place, en ne craignant pas de le distribuer pour se faire des amis : le seul problème, c’est qu’il ne s’agissait pas de son argent mais de celui de son patron…

Mes frères, mes sœurs, l’homme sérieux, c’est celui qui gère avec désintérêt pour lui-même et avec un intérêt constant pour les autres.

Il nous faut donc prier pour nos hommes d’Etat et nos politiciens, comme le demande saint Paul. Il faut le faire avec urgence car ceux-ci ont une tâche importante qu’ils doivent accomplir en hommes religieux et sérieux, c’est à dire avec honnêteté, dévouement et en restant au service de tous et plus particulièrement des plus nécessiteux, de ceux qui ne peuvent pas rendre ce qu’on leur donne.
Nos hommes politiques reçoivent en gérance le pouvoir d’organiser la vie de la cité mais aussi, avec lui, la tentation constante d’en mésuser, de le détourner à leur propre avantage, de l’utiliser pour leurs amis…

Aussi, comme nous le demande saint Paul, nous prierons aujourd’hui pendant cette messe comme tout au long des jours qui viennent pour que l’Esprit de discernement, de justice, de force, de sagesse et, pourquoi pas de sainteté, soit accordé à ceux qui nous serviront au gouvernement de nos cités et de notre pays.

 

 

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