Messe du 24ème dimanche ordinaire

 

Abbé Bernard Métry, église de St-Pierre-de-Clages, Vs, le 11 septembre 2005

Lectures bibliques : Sirac 27, 30 – 28, 7; Romains 14, 7-9; Matthieu 18, 21-35 – Année A

Pierre avait été séduit par la personnalité de Jésus-Christ et puis sans trop savoir où tout cela allait le mener, il avait décidé de tout lâcher, sa famille, son boulot, pour vivre l’aventure de la foi.

Et maintenant, cela faisait un bon bout de temps qu’une question lui brûlait la langue. A force de voir Jésus pardonner à tort et à travers et même à des gars peu recommandables comme Lévi ou Zachée, Pierre se disait que quand même, à un moment donné, Jésus allait mettre un frein à son pardon.

Nous fonctionnons également presque toujours ainsi. A un tel, c’est fini, je ne lui adresse plus la parole. A un autre, je ne lui prête plus rien. Maintenant encore, je suis d’accord de faire un pas, mais c’est le dernier et pas un de plus. C’est vrai que nous avons tendance à mettre des limites à notre pardon : « Cette fois-ci je te pardonne, mais c’est la dernière fois »

Pierre lui avait même proposé d’aller jusqu’à sept fois, convaincu qu’il était très généreux dans sa mesure. Comme lui, nous voulons nous contenter d’un pardon limité, d’un pardon sur mesure, d’un pardon répété « jusqu’à sept fois », mais pas un de plus.

Depuis quelques temps déjà, c’est toujours Pierre qui se met en avant dans l’évangile. Il ne brille pas toujours par son ouverture d’esprit. Bien sûr, pardonner sept fois, c’est pas mal. C’est même beaucoup, mais pas inhumain !

Pour Jésus, seul le maximum est la règle. La règle avec lui, c’est la démesure.

A travers la parabole, nous sommes invités à regarder Dieu. Il commence par s’émouvoir devant celui qui veut se reprendre. Il est « saisi de pitié », nous dit la parabole. Comme si on voulait nous faire comprendre que son cœur de père l’emporte sur son rôle de juge.

C’est alors que se produit l’inattendu. Et c’est le sommet de la parabole. Non seulement Dieu est ému. Dieu pardonne. Dieu fait confiance. Mais Dieu annule ma dette. Nous voici dans la logique de Dieu du jour au lendemain : ce que je dois m’est remis. Je deviens libre. Je suis blanchi.

Comment n’aurais-je pas dès lors envie de vivre à la manière de Dieu ? De me laisser émouvoir par la situation de celui qui m’a fait du tort. De pardonner à mon tour sans me préoccuper de savoir qui doit faire le premier pas. De modifier ma manière de le voir et de parler de lui !

A moi de lui faire confiance ! De croire en lui ! Comme Dieu ! Oui, comme Dieu !

Nous vivons souvent le triste spectacle de l’homme qui est un loup pour l’homme. Pour une fois, nous avons un homme humain, le maître de la parabole. Il va au-delà de ce qui lui est demandé. On lui demande de patienter, il annule la dette énorme.

Le serviteur, lui, n’accorde à son compagnon ni remise ni délai. Il s’agissait pourtant d’une broutille ! « Il se jette sur lui pour l’étrangler ». Insensible à sa prière, la même que la sienne tout à l’heure : « Prends patience envers moi, et je te rembourserai », il le fait jeter en prison jusqu’à ce qu’il ait tout remboursé ».

Le comportement de Dieu est à l’opposé de la logique et de la justice humaines qui exigent un châtiment proportionné à la faute. Une fois de plus Dieu nous prend à contre-pied !

Pour comprendre le pardon, le Christ nous resitue devant Dieu, devant son projet. Et là, nous sommes tous en dette avec lui et la question de Pierre ne se pose plus.

 

 

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