Messe du 10e dimanche ordinaire

Antonia Hasler, assistante pastorale, à l’église de la Trinité, Berne, le 6 juin 2010
Lectures bibliques : 1 Rois 17, 17-24; Galates 1, 11-19; Luc 7, 11-17 – Année C

 

Une mère suit, avec grande tristesse pour son fils, un cortège funèbre qui sort de la ville pour aller enterrer le jeune homme. Une image qui nous est familière même si nous ne traversons plus la porte de la ville pour enterrer nos morts. Nous, nous nous tenons au pied de la tombe d’un être cher et c’est ensuite comme une lourde porte qui se ferme pour toujours. Nous devons laisser là l’être aimé et se séparer de lui à tout jamais. A ce moment-là, c’est peut-être même une part de nous-même qui meurt aussi et on n’est plus tout a fait la même ou le même quand on retourne à notre vie de tous les jours.
L’histoire que nous raconte l’Evangile de Luc prend étonnamment une autre tournure. Jésus et la foule qui le suit rencontre le cortège funèbre, comme s’il venait de nulle part. Jésus ne passe pas devant le cortège en silence, au contraire, il l’arrête. – Un mot de consolation pour la maman : Ne pleure pas ! – un contact tout léger, – une parole forte : Lève-toi ! Et tout s’éclaircit. La mort et la vie se sont rencontrées et la vie a vaincu.
Cette histoire ne s’envisage plus aujourd’hui avec la même évidence. La croyance en la Résurrection est difficile. L’intention de l’évangéliste Luc est précisément de renforcer la foi en la Résurrection dans sa jeune communauté.
Quelques années auparavant, Paul avait écrit : “ Car si le Christ n’est pas ressuscité, notre message est sans objet, votre foi est sans objet“
Aujourd’hui c’est pareil : sans le message de la Résurrection le christianisme serait une boîte vide, sans le message joyeux de la Rédemption de Jésus, la confession de foi chrétienne serait une erreur épouvantable. Dieu serait dépouillé de sa raison principale qui est de se faire connaître et être proche de nous, les hommes et les femmes.
Comme aumôniers, nous accompagnons des mourants et on constate souvent que la question de l’au-delà peut devenir douloureuse.
Comment nous pouvons interpréter la mort pour notre vie, la grande inconnue après la mort occupe toutes les religions. Le questionnement est le même dans toutes les religions, c’est seulement les réponses qui sont différentes. La réflexion sur la mort et sur ce qui vient après est aussi une partie de la recherche du sens de notre vie.
A y réfléchir, il y a à notre époque une diversification des représentations de l’au-delà dans notre société. Rien que chez les adolescents en Suisse prédomine l’opinion selon laquelle la mort n’est pas la fin ultime, pourtant seul un tiers d’entre eux croit en la résurrection dans le sens chrétien du terme. Presque la moitié croit en la réincarnation sans pourtant la décrire comme non chrétienne.
Cette évolution est favorisée par la privatisation de la religion : les adolescents comme beaucoup d’adultes ne font pas démonstration publique de leur religiosité; les expériences de foi ne sont plus partagées et fêtées en communauté. Cela explique aussi l’appauvrissement de la langue.
Pour l’Eglise, cette évolution est un grand défi. L’annonce de l’évangile dans la liturgie, la catéchèse, dans la pastorale avec les jeunes ou les adultes est renvoyée au même point : trouver une langue commune pour parler de Dieu et des expériences avec lui.
Mais peut-être qu’à travers cette crise va-t-on voir apparaître un retournement, comprendre que la foi et tout autant que la croyance en la résurrection a à faire non pas seulement avec l’au-delà, avec l’insaisissable ou l’inatteignable, mais aussi elle peut devenir une expérience humaine et pas seulement transmise par une expérience religieuse.
L’Evangile du jour traite des hommes qui sont touchés par une rencontre avec Jésus. Jésus crée comme dans la plupart de ses rencontres des relations positives où tout de suite la confiance peut s’établir : „ ne pleure pas“, dit-il à la veuve. Et tout de suite après la transformation de la personne est rendu possible – même le passage de la mort à la vie.
Jésus se montre sensible aux femmes et aux hommes qui souffrent, qui se questionnent, qui cherchent. Il ressent de la compassion pour la veuve au premier regard, elle qui avec son fils a aussi perdu un soutien de famille et un protecteur.
La résurrection a aussi un aspect relationnel très fort. Pas seulement un moment-clé pour quelques-uns, où toutes ses questions ou ses propres souffrance ont une fin. Le fils qui est rendu à la mère, dans d’autres récits de résurrection le père Jaïrus voit sa petite fille revenir à la vie, Lazare retourne chez ses sœurs.
Même quand nous ne savons pas comment il nous est promis de revoir des êtres chers. Luc accorde beaucoup d’importance à ce passage : „ et il le rendit à sa mère“.
Pour moi personnellement, la résurrection n’a pas de sens sans une communauté aimante, sans solidarité et sans espoir. C’est le résumé de ma lecture personnelle de la volonté salvatrice de Dieu dans la Bible et à notre époque.
Chaque fois, quand l’homme marginalisé d’aujourd’hui n’est pas laissé sur le bas côté, chaque fois que des hommes et des femmes soutiennent d’autres sans égoïsme, et bien ce sont des signes annonciateurs de résurrection.
Ce sont des petites histoires, des petites choses, mais cela nous donne une idée de ce qu’est cette immense libération que Dieu nous promet à la fin. Amen.

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