Messe de Minuit

Père James Noonan, à l’église des Carmes, Dublin, le 25 décembre 2009
Lectures bibliques : Isaïe 62, 1-5 ; Actes des Apôtres 13, 16-25 ; Matthieu1, 1-25 – Année C

 

Chères soeurs et chers frères, je vous exprime, ainsi qu’à vos familles, mes salutations les plus chaleureuses et mes voeux les plus sincères de paix en cette sainte nuit et au cours de I’année à venir.
Noël est toujours quelque chose de profond en nous, enveloppant notre coeur, nous rendant plus conscients des besoins de notre vaste monde et de notre communauté. Dans les salutations et les cartes envoyées dans les jours précédant Noël, nous avons tenté d’exprimer nos espoirs et nos attentes pour cette sainte période. Je souhaite que ce soit un temps de célébration, de bonheur et de paix pour vous et vos familles et que vous receviez la chaleur, la lumière et la beauté de la lumière divine envoyée d’en-haut.
Ici, au coeur de Dublin, nous voyons toutes les marques habituelles de préparation à Noël, la multitude de lumières, décorations, rencontres, chants de Noël, quêteurs pour des causes valables, le Père Noël avec ses cadeaux et acheteurs à la recherche de cadeaux pour leurs proches. Les paroisses et chorales font également de leur mieux pour préparer messes de minuit et chants de Noël. Tout cela contribue à une joyeuse célébration.
Cependant, pour d’autres, Noël n’est pas seulement un temps de célébration. C’est aussi un temps de sentiments contradictoires, un temps de tristesse autant que de joie, si par exemple, vous avez récemment perdu votre emploi dans les difficultés économiques actuelles, ou perdu votre appartement à cause des récentes inondations ici en Irlande. Noël peut accentuer vos désirs, celui d’avoir à votre table un être cher disparu, ou simplement la chance de rentrer chez vous et d’être en famille. Noël avec tout son bonheur, peut laisser en vous un vide profond.
Chez nous, en Irlande, ce Noël est rempli plus que de coutume, d’une immense tristesse. Nous avons été troublés et meurtris par la peine et la souffrance des victimes de pédophilie et d’abus sexuels évoqués ces temps derniers. Nous avons été horrifiés et remplis de honte face au monde par ce que les rapports Ryan et Murphy révèlent sur la manière dont ces crimes ont été couverts. Nous ressentons de la honte pour notre pays, notre Eglise et notre diocèse. Je sais que certains d’entre vous, à I’extérieur, trouvent un peu étrange d’avoir une retransmission de la messe de Noël actuellement. Nous avons besoin de vos prières pour nous en cette nuit de Noël et nous prions particulièrement pour les victimes de ces abus. Nous nous tournons vers le Christ Jésus, le Sauveur nouveau-né, pour guider notre Eglise vers un renouveau pour qu’elle devienne plus ouverte et transparente et prête à mettre particulièrement l’accent sur la protection de nos enfants.
En ce Noël nous entendons aussi des récits d’efforts incessants de la part de familles qui ont vu leur foyer détruit par les récentes inondations. Nous savons qu’il y a de généreux volontaires qui donnent leur temps et leurs possibilités pour aider ceux qui sont le plus en difficulté dans notre société. Bien que ces déclarations soient souvent pleines d’espoir, elles nous rappellent cependant les vies brisées ou disparues à cause des forces de la nature et des effets du changement de climat.
Ce soir nous chantons « et les cieux et la nature chantent – et les cieux – et les cieux – et la nature chantent ». Nous chantons cela à Noël, au milieu d’un monde où la Nature chante parfois et où parfois elle détruit. « Paix sur terre, douceur et miséricorde ». Mais la paix semble parfois très lointaine dans un monde détruit par la violence, la maladie et la faim.
Alors, comment célébrer Noël dans un monde disloqué ?
Tout d’abord, nous devons accepter que Noël ne soit pas un temps qui prétende que tout va bien dans le monde. Ce pourrait être tentant, mais à la fin du compte faux et contraire au message évangélique.
Alors que faire ? Eh bien, d’un côté je proposerais que nous laissions Noël accroître nos désirs. Tant d’entre nous vivent prostrés, acceptant comme normale la faillite de notre monde, plutôt qu’une réalité nécessitant un divin remède. Le thème de la « paix sur terre » à Noël devrait augmenter notre désir de paix sur la terre. Il devrait augmenter notre répulsion de la violence, de l’injustice. Il devrait accroître notre espoir en l’avenir tout en nous encourageant à être, autant que possible, des artisans de Paix.
Un autre aspect de la célébration de Noël dans un monde malade est de s’émerveiller de la naissance du Christ. Jean l’indique brièvement dans le prologue de son évangile en disant : « Et le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous et nous avons vu sa gloire, la gloire du fils unique du Père, plein de grâce et de vérité ».
Le Verbe de Dieu qui était avec Dieu et était vraiment Dieu s’est fait homme en l’Enfant Jésus. Plutôt que se retirer de notre monde déchu, plutôt que le guérir de loin, Dieu a choisi de venir dans ce monde comme un enfant vulnérable. Lorsque cet enfant grandit, il connut le mal, la peine, la confusion, la détresse et toutes autres choses communes aux êtres humains, excepté le péché. Finalement il connut la douleur issue du péché lorsqu’il « devint péché » pour nous sur la croix.
Noël célèbre la bonne nouvelle que Dieu nous a apportée et qu’il apporte toujours. Dieu est entré dans notre réalité en Jésus-Christ. Et ce Dieu, Emmanuel, vit maintenant en l’âme de chacun de nous et veut nous conduire tous à lui avec notre mal et notre souffrance.
Il existe donc une promesse de la paix, celle d’un monde brisé maintenant sauvé. Ce que Dieu a fait par l’incarnation est le début de la véritable paix sur terre, même si elle n’existe pas encore complètement. La fracture de notre monde est en vérité celle de notre propre vie, elle nous conduit vers le seul qui apporte la guérison. Et c’est lui, le seul, dont nous célébrons la naissance à Noël.

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