Messe de Minuit

Mgr Michel Dubost, évêque d’Évry, cathédrale de la Résurrection d’Évry , le 24 décembre 2008
Lectures bibliques : Isaïe 9, 1-6; Tite 2, 11 Luc 2, 1-14-14; – Année B

 

 

Noël : un enfant nous est né, un fils nous a été donné, venez, adorons-le…
Vous avez quitté votre domicile, peut-être vos amis sont-ils en train de réveillonner, vous avez traversé la nuit ; ou bien vous êtes devant votre télévision ou votre ordinateur et votre nuit est celle de la vieillesse, de la maladie, de la prison, du désespoir ou de la solitude… et je n’ai qu’une chose à vous dire : un enfant nous est né, un fils nous a été donné, venez, adorons-le…
Vous avez peut-être, au cœur, des attentes invraisemblables, des imaginations de rencontres, des rêves de victoires improbables, des chimères de rentrées d’argent extraordinaires, des souhaits de succès triomphants… Vous pensez, peut-être, que Dieu peut venir vous sortir de la nuit dans le clinquant d’une fête où il imposerait sa force comme le suggère Isaïe…

Je n’ai qu’un enfant à vous montrer.
Dieu se manifeste par un enfant.
Un enfant qui ne parle pas. Un corps qu’il faut soigner avec douceur.
Tellement de gens disent tellement de choses sur Dieu qu’il est difficile de savoir qui il est – mais ce que je sais, c’est ce qu’il dit par cet enfant : « Je ne suis pas venu pour vous compliquer la vie, je ne suis pas là vous prendre la tête, je suis là pour vous demander de la tendresse. »
Ma mission est de vous dire que Dieu est simple, que la force de Dieu se manifeste par le sourire d’un bébé qui répond à la caresse d’une mère replaçant sa mèche de cheveux.
Ma mission est de vous dire que la force de Dieu, c’est la tendresse.
Voir Dieu autrement conduit au désespoir, au rêve, ou à la violence…
Écoutez la louange des anges, eux ils savent Dieu : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix aux hommes qu’il aime. »
Un enfant nous est né, un fils nous a été donné, venez, adorons-le…
Beaucoup d’entre vous, habitants d’Évry, vous avez quitté votre domicile de l’autre bout du monde pour venir ici : vous voici dans cette cathédrale.
Dehors, il fait nuit. Je veux dire ce que les journaux expliquent à longueur de pages : nous vivons une crise, une crise du prix des denrées alimentaires dans le monde, une crise de la violence qui zigzague à travers les pays, de la Géorgie au Soudan comme les éclairs des mauvais jours d’orage, une crise écologique, une crise économique…
Ensemble, dans cette nuit, je l’affirme, nous sommes le corps du Christ. Nous sommes petits, nous ne savons pas parler au monde, périodiquement, les gens annoncent notre mort ; mais, mangeant un même corps, buvant à la coupe du salut, nous savons que nous faisons corps avec le Christ grâce à son Esprit.
Et, depuis 60 ans, dimanche après dimanche, la télévision a permis, pour plus d’un milliard de regards, de rejoindre spirituellement ce corps du Christ qu’est l’Église.
Indochine, Suez, Algérie, changement de Républiques, bouleversements techniques, concile, perte de mémoires, désespoirs, progrès fantastiques les tempêtes économiques, politiques, médiatiques, ecclésiales ont pu secouer le navire, dimanche après dimanche, il a été possible d’avoir une fenêtre ouverte sur ces crèches vivantes que sont les paroisses de notre pays… Elles sont toutes présence du corps de Celui qui vient de naître.
Oui, elles sont plus que des signes… Jésus y est là, présent. L’Église est le corps du Christ.
Un enfant nous est né, un fils nous a été donné, venez, adorons-le.
Dans la nuit, nous savons que tout ce qui est humain est précaire.
L’enfant livré aux mains de la sage-femme sera livré un jour aux soins mortuaires.
Notre monde a découvert qu’il peut disparaître : hier, nous avions peur des bombes atomiques – elles existent toujours – aujourd’hui, nous avons peur du CO2 et du réchauffement climatique… Notre monde a découvert sa précarité !
Peut-être pensez-vous que je ne devrais pas parler de cela en cette nuit… C’est trop sérieux, trop tragique pour une nuit de fête. Mais non !
Un enfant nous est né, un fils nous a été donné : cette nuit annonce un autre jour, nous vivons l’aurore d’un jour nouveau. Il est le Sauveur, celui dont la Parole est plus forte que la mort, que toute mort…
Sa naissance est notre naissance – la vôtre, la mienne- celle du monde au bonheur. Liés à lui, nous pouvons, certes, mourir physiquement, mais nous sommes vivants pour toujours.
Oui, nous sommes en voie de résurrection ! Et la terre, mystérieusement, est en chemin vers l’unité.
Je sais que cela est difficile à croire, mais c’est ce qu’annonce cette naissance.
La tendresse de Dieu est plus forte que la mort, elle est plus forte que notre difficulté à croire, que notre péché, que notre imagination qui nous fait trop facilement croire que nous sommes des médiocres ou des punis et nous empêche de croire à l’amour.
Nous avons tous besoin de tendresse et cette tendresse nous est donnée pour toujours.
La paix est en marche !
Un enfant nous est né, un fils nous est donné, venez, adorons-le !

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