Messe de la Nativité du Seigneur

Abbé Thierry Fouet, à l’église Saint-Joseph, Genève, le 25 décembre 2008
Lectures bibliques : Isaïe 52, 7-10; Hébreux 1, 1-6; Jean 1, 1-18 – Année B

 

C’est une scène bien familière, et si touchante, que de voir des parents, des proches et des amis se pencher sur un berceau. On s’interroge déjà sur l’avenir de bébé et chacun tente de découvrir à qui il peut bien ressembler ! On observe le visage, les yeux, la forme de la bouche, des oreilles tout ce qui fait un visage unique et cependant hérité de toute une lignée et qui permet de reconnaître, parmi les proches, un homme ou une femme….
En ce jour de Noël, les crèches disposées dans nos églises nous invitent à la même démarche : à qui Jésus ressemble-t-il ? Quel est ce visage de Dieu qui vient jusqu’à nous ?
C’est là dans ce tout petit visage, si fragile, c’est là que la lumière incréée, éternelle, prend la forme de deux petits yeux éblouis ; c’est là que la tendresse créatrice se fait bouche qui nous sourit ; c’est là que la puissance divine se fait bras qui se tendent vers nous…. Toutes nos conceptions de Dieu et de l’homme volent en éclats : Dieu-enfant… prenons le temps de nous émerveiller…
Oui sous les traits de ce bébé qui va devenir l’homme – Jésus, Dieu nous montre son vrai visage.
Il n’est pas cette sorte de grand horloger qui organiserait froidement les hommes et les évènements du monde.
Il n’est pas davantage le grand justicier de l’univers pour exclure et punir ou faire peur. Ce sont là des caricatures de Dieu qu’il nous faut vite jeter très loin et démaquiller afin de trouver le visage de l’enfant de Noël, le visage aimant de Dieu.
L’Apôtre et Evangéliste Jean nous déclare aujourd’hui : ne vous trompez pas, ce tout-petit est le Tout-Grand ! cet enfant couché sur la paille : c’est le Fils de Dieu.
Ce bébé qui ne parle pas encore comme nous, mais ne fait que balbutier, faites bien attention, c’est le Verbe, la Parole de Dieu qui se fait chair.
Ce tout petit qui est né il n’y a que quelques heures, attention, il existe de toute éternité auprès du Père.
Ce petit qui va pleurer quand il aura faim, ce petit qui ne sait pas encore faire de discours et qui, comme tous les enfants, devra apprendre à lire et à écrire : il est la Parole éternelle de Dieu, Parole première et dernière, l’Alpha et l’Oméga, Parole créatrice, Parole qui se fait nourriture.
Ce bébé, que l’on aperçoit à peine dans la pénombre de la crèche, attention, il est la Lumière du monde, il est le roi céleste devant qui se prosternent les anges.
Oui attention nous dit Jean car « Dieu… est venu chez les siens et les siens ne l’ont pas reçu! ». Voilà le drame permanent de notre monde.

Chers amis, le Dieu de Jésus-Christ, nous n’avons pas à l’imaginer : nous avons à l’accueillir tel qu’il se présente à nous. Il ne nous regarde pas de là-haut, il se fait tout proche de nous. Il se fait intime à nous-mêmes, en nous-mêmes.
Ce petit enfant, le Verbe fait chair, nous pousse à incarner notre foi, à faire ce que nous disons, à incarner cette présence de Dieu en nous, parmi nous, dans ce monde qui est le nôtre aujourd’hui.
La Parole qui se fait chair, Dieu qui se fait homme, ce n’est pas un résultat, ce n’est pas un achèvement, c’est un commencement, c’est une naissance pour chacun. Dès lors plus rien de notre humanité ne lui est étranger : Jésus, par son incarnation, rejoint toute personne, et il accueille toutes les situations, sans exclusive. Grâce à l’enfant-Jésus, je peux regarder Dieu les yeux dans les yeux, accueillir la saveur de la vie et me découvrir, moi aussi, enfant bien-aimé du Père.
Chers amis et téléspectateurs, en ce jour de Noël, Dieu nous invite à écouter en chacun de nous l’enfant-Dieu, à l’accueillir pour le faire grandir en nous, lui la Parole qui fait naître et renaître et se laisse découvrir à ceux qui le cherchent avec les yeux du cœur.
Dieu ne s’est pas fait homme pour jouer ou faire semblant, il n’est pas venu voir « ce que cela fait » d’être un homme. Il est simplement venu se donner par amour, lui-même afin que nous ayons Dieu en nous, Dieu en personne.
C’est la raison pour laquelle l’amour n’en finit pas de naître sur notre terre. C’est Noël chaque fois qu’en me regardant et en regardant un visage d’enfant, de femme, d’homme, j’ose y discerner les traits de Dieu.
Noël nous dit que tout être humain a une valeur infinie aux yeux de Dieu, au point de s’impliquer ainsi complètement dans notre condition terrestre. En venant parmi nous, le Christ nous prend pour ses frères et sœurs, et il nous traite comme tels. Nous sommes de la famille de Dieu. Jésus, visage de Dieu, vient nous montrer notre vrai visage, notre avenir : nous sommes enfants de lumière. Voilà le « gène » spirituel introduit dans notre patrimoine génétique par la venue du Christ.
Stupéfiante humilité de Dieu qui se cache et se révèle sous les traits d’un enfant. Quoi de plus innocent et de plus pur que le regard d’un enfant ? Dans les yeux d’un enfant, de cet enfant-là, même le truand, même l’homme le plus blasé peuvent encore voir briller l’espérance d’un monde d’amour et de paix. Quand Dieu vient sauver l’homme armé jusqu’aux dents ou retranché, prisonnier dans ses forteresses, il prend les yeux d’un enfant pour nous regarder. Son seul pouvoir est celui de l’amour. Un amour désarmant.
Dieu prend la fragilité d’un enfant pour nous donner la force de son amour car dans le corps de ce tout petit, c’est le cœur de Dieu qui bat.
Seigneur tu es le tout-puissant, mais ta puissance est celle d’un bébé : capable d’éveiller, le plus dur des cœurs, à la tendresse et à l’amour. A nous d’incarner ta présence dans la crèche de nos vies quotidiennes en nous regardant comme tu nous regardes.
Amen.

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