Messe de la fête de l’Epiphanie

 

Abbé Roland Udry, à l’aumônerie de l’Hôpital de Sion, le 6 janvier 2002

Lectures bibliques : Isaïe 60, 1-6; Matthieu 2, 1-12

La naissance du Christ à Bethléem, événement capital pour l’histoire de l’humanité, va passer inaperçue pour la ville encombrée par le recensement. Un enfant de plus, né au hasard d’un déplacement, pour un peuple nomade, quoi d’extraordinaire !
La ville de Jérusalem, la capitale, l’ignore aussi. Pourtant, il y avait des prêtres et des scribes experts en Saintes Ecritures connaissant bien les prophéties. Et l’événement se passe à quelques km de la ville. Il faudra l’arrivée d’un cortège singulier, pour mettre en émoi le palais royal d’Hérode.
L’évangile de ce jour nous parle de mages venus d’Orient qui demandent : « Où est le Roi des juifs qui vient de naître ? Nous avons vu se lever son étoile en Orient et nous sommes venus pour l’adorer. »
On ne les attendait pas. Ils ont dû faire sensation. Nous imaginons volontiers un cortège haut en couleurs avec chameaux ou dromadaires. Etait-ce vraiment des rois ? L’évangéliste Matthieu nous dit simplement des Mages, c’est-à-dire des savants, peut-être des astronomes de Babylone, puisqu’ils ont vu une étoile se lever.
Pour notre confort intellectuel, nous aimerions bien savoir ce que signifie cette mystérieuse étoile, à quelles observations astronomiques elle correspond.
Laissons là ces questions, ce n’est pas l’essentiel !
Ce qui frappe, ce qui est étonnant, c’est cette révélation de la naissance du Christ à des païens ! Dieu avait préparé un peuple pour accueillir son Fils. Tout l’Ancien Testament parle de l’attente du Messie par le peuple d’Israël. Il a multiplié les signes et les prophéties. Pourtant nous dit S. Jean : « Il est venu chez les siens et les siens ne l’ont pas accueilli. »

La conduite de Dieu n’est-elle pas déroutante !
Il révèle à des païens, par un signe miraculeux, la naissance de son fils et ne fait pas signe aux siens de la naissance du Messie Ce n’est pas tout à fait exact ! Un petit Reste, une poignée de gens simples ont accueilli le Christ : Marie, Joseph, les bergers. Mais le clergé officiel a tout ignoré. Les chefs d’Israël et leurs experts, les scribes ne se sont pas mis en route pour Bethléem, alors que la visite des mages aurait dû les provoquer!

A partir de ce fait, posons-nous une question : comment réagissons-nous face aux interpellations que Dieu peut nous faire par des hommes qui ne partagent pas notre foi ou nos convictions ?
Sommes-nous prêts à nous laisser interpeller par des incroyants, des hommes des femmes qui ont abandonné une pratique régulière.
Ils essaient de vivre plus simplement, de réaliser un meilleur partage des biens et de leurs richesses. Ils se montrent accueillants, ils ne condamnent personne. Ils refusent de travailler uniquement pour un profit égoïste.
Ce qu’ils recherchent dans la nuit, n’est-ce pas ce que nous n’avons pas su leur offrir ? Des valeurs évangéliques que nous avons sous-estimées. L’incroyance déclarée de personnes qui nous entourent n’est-elle pas un signe que Dieu nous fait pour que nous nous réveillions et que nous accordions notre vie à ce que nous croyons profondément.

Le 2ème aspect important de ce texte de Mt, c’est la réponse de foi de ces hommes :  » Nous avons vu son étoile et nous sommes venus nous prosterner devant lui… Entrant dans la maison, ils tombent à genoux et l’adorent…  » Au signe que Dieu leur fait, ils répondent immédiatement. Ils quittent leur famille, leurs occupations, leur pays.
Ils nous est difficile d’imaginer les difficultés du voyage et peut-être aussi les railleries de leurs contemporains !
Suivre une étoile… Pour sûr qu’ils furent traités d’illuminés.
Dans leur enthousiasme, ils se dirigent vers Jérusalem, marchent à travers le désert, dorment la nuit dans des campements de fortune
Mais voici que l’épreuve les attend. L’étoile disparaît au moment où ils arrivent dans la capitale.
Pourquoi cette mauvaise farce alors qu’ils semblent toucher au but ?
Pour mettre leur foi à l’épreuve? Pour qu’en interrogeant ils annoncent aux juifs, eux les païens la naissance du sauveur? Peut-être! J’ose une autre explication qui me paraît plus judicieuse.
L’étoile n’a pas disparu, ce sont les mages qui n’ont plus su la voir!
Tant qu’ils marchent dans le désert, aucune distraction ne les détourne de l’étoile. Ils ne peuvent la perdre de vue ! Leur pensée est tout orientée vers celui qu’ils doivent découvrir. Leur coeur est brûlant du désir de le trouver au plus vite. Mais arrivés dans la ville de Jérusalem, ils sont surpris par l’agitation le bruit, l’animation des rues. Il y a plus intéressant à regarder qu’une étoile ! Lorsqu’ils se ressaisissent et relèvent la tête pour chercher leur direction, l’étoile ne leur apparaît plus. Il faut qu’ils sortent de la ville, du bruit pour la trouver à nouveau.

Il nous est dès lors facile de faire une application pratique à nos vies.
Dans le bruit, l’agitation, le travail, les soucis, il nous arrive de perdre notre étoile. Nous sommes tellement occupés ou préoccupés que nous n’avons plus le temps de réfléchir, de prier, de penser à Dieu, à l’essentiel… Notre foi pâlit, notre conscience faiblit, se tait, étouffée. Nous sommes dans la nuit, sans but.
Mais si nous faisons halte pour réfléchir, pour interroger la Parole de Dieu, ceux qui connaissent les Ecritures, qui ont mission de l’annoncer, alors nous retrouverons, au moins, une faible lueur qui doit nous éclairer sur le chemin de notre vie.
Cette étoile qui peut nous conduire c’est Jésus Christ.
C’est ce qu’ont découvert les mages en arrivant à Bethléem.
Ce que Dieu à voulu révéler à ces trois païens, ce qu’ils ont accepté dans la foi, Dieu veut le révéler à tous les hommes! C’est le sens de cette Epiphanie ou manifestation de Dieu à tous les hommes.

Si Noël est une naissance du Christ dans une famille, dans une petite bourgade, dans un peuple, l’Epiphanie est une révélation au monde, à tous les peuples, d’un Christ cosmique d’un Dieu qui ne peut être accaparé par une nation, par une religion, par une secte, mais un Dieu qui veut rassembler tous ses enfants dans un même amour.
La fête de l’Epiphanie n’est pas seulement une fête folklorique avec le gâteau des Rois, ou le défilé de personnages de légende, Gaspard, Melchior ou Balthazar.
C’est un fête missionnaire par excellence.

L’annonce du Christ à tous les hommes demeure après 2000 ans une nécessité impérieuse pour l’Eglise, donc pour chaque chrétien.
Il faut des signes pour que les incroyants se mettent en route sur le chemin de la foi.
Il y en a de lumineux comme ceux de Mère Thérésa de Calcutta, de Martin Luther King, de Sœur Emmanuel du Caire, de l’abbé Pierre, de Mgr Gaillot.
Il y en a de plus simples : le travail de tous les missionnaires religieux ou laïcs qui s’engagent à servir les plus déshérités et à leur révéler l’amour de Jésus-Christ. Il y a notre témoignage personnel, là où nous sommes.
Nous ne pouvons pas tous être des étoiles de science, de sagesse ou de sainteté, mais nous pouvons tous développer cette flamme qui nous anime et faire rayonner, au moins, une faible clarté de Jésus-Christ, Lumière des Nations.
Que chacun devienne Epiphanie, manifestation de l’Amour du sauveur. Amen



’Amour du sauveur. Amen


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