Messe de la fête de l’Ascension

 

Père Gilbert Gex-Fabry, à l’église Notre-Dame, Nyon, VD, le 9 mai 2002

Lectures bibliques : Actes des Apôtres 1, 1-11; Ephésiens 1, 17-23; Matthieu 28, 16-20

Au moment où Jésus prend congé de ses disciples, il les charge d’être témoins, témoins de son œuvre dans notre monde, témoins de sa mort et de sa résurrection, témoins de la croissance du Royaume : Allez donc de toutes les nations, faites des disciples.

J’y vois pour ma part un moment qui contribue à la formation de l’Eglise, une Eglise qui prendra réellement son élan à la Pentecôte, une Eglise soucieuse d’accueillir la puissance que dégage le Christ de la Résurrection. Saint Paul dans l’épître aux Ephésiens ne nous invitait-il pas à porter notre regard sur cette énergie que Jésus déploie.

Une Eglise qui porte témoignage de la présence du Christ en elle. Il s’agit d’une Eglise qui porte en elle un trésor dans des vases d’argile, elle porte Celui qui nous dit dans l’évangile : Je suis avec vous jusqu’à la fin du monde. Il est des croyants qui sont témoins de cette présence. J’accueille pour ma part avec admiration ces déclarations enthousiastes d’un prêtre qui a marqué la fin du siècle passé : « Je me sens bien dans l’Eglise » écrit-il. Il n’est pas aisé de dire pourquoi, car c’est plus facile d’expliquer des malaises que de décrire un bonheur. Mon bonheur d’Eglise peut-il ajouter, a un nom : j’aime le Christ et l’Eglise est le pays du Christ. Quand je participe à une liturgie, quand je me lève pour aller communier, quand je lis un beau texte d’Eglise, quand je me mêle à un grand rassemblement, mes deux amours sont là : étroitement liés : le Christ et celle qu’il a fait naître de lui pour pouvoir nous atteindre tous et de toutes les façons. J’aime ma bible, c’est l’Eglise qui m’a préparé cette nourriture royale. J’ouvre mon bréviaire, c’est l’Eglise qui me fait entrer dans sa grande prière. Je prépare la messe du dimanche, ce sera un rendez-vous d’amour ecclésial : j’y serai avec le Christ et avec mes frères. Comment ne pas dire oui à l’Eglise ?

Avec émotion je pense aux auditeurs fidèles à cette émission dominicale et qui disent : « J’aime le Christ et j’aime l’Eglise c’est pourquoi chaque dimanche j’ouvre mon poste pour m’associer à la messe à la radio ». Vous êtes aussi témoins de cette présence de Jésus dans son Eglise.

Témoins, nous nous savons membres d’une communauté faite de grandeurs et de faiblesses. Docile à l’Esprit, cette Eglise fait notre joie. Fragile elle atteint le cœur du Christ encore plus que le nôtre.

C’est pourquoi nous devons nous aider, nous encourager à être témoins. Il est urgent que comme Eglise nous prenions davantage conscience d’être en mission dans ce monde. Allez, de toutes les nations, faites des disciples. Il y a bien longtemps, j’ai rencontré cette parabole qui portait comme titre « l’Evangile ». C’est l’histoire d’un Seigneur noble et riche qui avait des parents et amis insouciants et imprudents. Ils se laissèrent surprendre par l’ennemi. Emmenés au cœur d’un pays hostile, par un adversaire sans pitié, ils furent enfermés dans une prison. Le Seigneur ne voulut pas abandonner ses proches. Après bien des peines, il réussit à les rejoindre. Il maîtrisa le gardien de la prison et à travers les grillages, il tendit aux enfermés la clef de la prison. Que firent les parents et amis insouciants et imprudents ? Ils s’assirent en cercle et commencèrent à palabrer. Les uns disaient que cette clef n’était pas une vraie clef. D’autres étaient d’avis qu’il fallait retrancher quelque chose qui était certainement inutile. Il se forma un troisième clan qui prétendit au contraire, que la clef était inutilisable ainsi et que certainement il fallait y ajouter quelque chose. Le Seigneur les exhortait à faire diligence, car le temps pressait. Il voulait qu’ils sortent au plus vite. A tout moment l’ennemi pouvait revenir. Mais ses parents et amis insouciants et imprudents ne voulurent rien entendre. Par la force des choses, ils restèrent en prison.

Cette parabole peut faire penser à l’église qui se perd parfois en questions futiles et inutiles. Mais l’enseignement est plus riche car la clef dont il est question est d’abord celle de la Bonne Nouvelle de l’Evangile qui appelle à témoigner en nous ouvrant aux autres et à Dieu. Le témoignage à donner ne consiste pas d’abord en paroles. Il est en actes. Tout le monde n’est pas appelé à des signes extraordinaires comme Raoul Follereau. Des gens de ma génération se souviennent que lors de son soixantième anniversaire il avait demandé que les 60 bougies de son gâteau d’anniversaire soient remplacées par les bougies de 60 voitures qui allaient permettre d’ouvrir dans le monde 60 nouveaux circuits de traitement de la lèpre pour soigner cent mille malades jusqu’ici hors d’atteinte.

Selon l’évangile un simple verre d’eau donné comme le Christ l’aurait donné peut être signe du Royaume et porter témoignage. Et autour de nous ce sont nos proches qui attendent ce verre d’eau, qui attendent de l’aide, de l’amitié, du respect, de la compréhension, la paix, la vérité. Nous venons de recevoir Guy Gilbert qui rappelait que l’amour était à vivre d’abord en famille.

Nous tenons dans nos mains une clef importante. Elle ouvre à l’espérance. Elle est dans ce signe d’unité, de respect, d’attention que Jésus attend de ses disciples. Elle est dans le témoignage que nous avons à donner.

On posait un jour à Flaubert cette question : « Quelle est la gloire que vous désirez le plus » ? « Celle de démoralisateur » répondit-il avec cynisme. Ses disciples sont aujourd’hui nombreux. Le monde attend de nous une autre réponse. A nous de la donner.

 

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