| Chantal Borbély, assistante pastorale, à l’église de Malleray (BE), le 11 juin 2006 Lectures bibliques : Deutéronome 4, 32-40; Romains 8, 14-17; Matthieu 28, 16-20 – Année B |
Ici, à Malleray, il est arrivé le week-end passé. Et vu le grand nombre de personnes qui l’attendaient et qui se sont pressées à aller le voir, ici, mais aussi partout en Suisse et dans le monde, on ne peut s’empêcher d’en parler. D’autant plus qu’avant d’aller le voir, beaucoup l’avaient lu. Peut-être vous dites-vous que je parle bien mystérieusement. C’est que le sujet se veut justement mystérieux ou plutôt révélateur de mystères. Oui, vous l’avez certainement deviné, je parle ici du film tiré de l’ouvrage le « da Vinci Code ».
Comme beaucoup, n’ayant pas réussi à me motiver à lire le pavé qu’est ce livre, je suis allée voir le film. Rassurez-vous, je ne vous redirai pas ce que vous avez pu entendre à travers les nombreuses critiques, d’ailleurs plutôt négatives, émanant des Eglises ou du monde de la presse concernant ce film. Pour moi, c’était un film tiré d’un roman policier avec plein d’intrigues, et pour qui aime les romans policiers, c’était un moment plus ou moins divertissant. Mais voilà : je sais bien que le « da Vinci Code » a la prétention d’être plus qu’un simple roman policier divertissant puisque, bien au contraire, l’auteur y présente tous les faits comme avérés. Il se pourrait que cette prétention fasse partie du jeu du roman et que personne n’y croie. Mais il semble que c’est un vrai engouement qui en est né, très sérieux, à la découverte de mystères cachés et de secrets relevant du domaine religieux et spirituel. Comme quoi, tous ceux qui pensent que la spiritualité et le religieux n’intéressent plus personne se trompent. Le succès ne s’arrête d’ailleurs pas au film. Je pense à tous ses dérivés commerciaux. Comme par exemple ces voyages organisés par une grande agence de notre pays sur les traces du « da Vinci Code » à la recherche du St Graal à travers l’Europe. Rien de moins que cela, et quand même une belle somme à débourser pour cinq jours … Cher le mystère !!!
Aujourd’hui, l’Eglise, les chrétiens, proposent de fêter et de découvrir aussi un mystère qui semble faire beaucoup moins parler de lui. C’est celui de la Trinité.
Aujourd’hui, un grand voyage nous est proposé, non pas à travers l’Europe, mais à travers les temps, aux sources de notre foi, à travers le témoignage de générations de croyants qui ont cru et essayé d’exprimer et de vivre ce mystère.
Ce voyage ne nous demande ni de délier les cordons de notre bourse, ni de prendre l’avion. On peut le faire ici dans cette église, chez soi devant sa radio, dans son fauteuil ou dans son lit.
Beaucoup de nos contemporains ne connaissent plus ce mystère de la Trinité ou n’y accordent plus aucun intérêt. Ils vont le chercher ailleurs, comme par exemple dans le « da Vinci Code », en accordant leur crédulité à un auteur de roman policier sans vérifier la véracité de ses dires. En disant cela, je ne critique nullement tous ceux qui ont aimé l’ouvrage de Dan Brown. J’aimerais simplement nous redire, à nous chrétiens, que notre Tradition et notre foi sont aussi intéressantes et capables d’enthousiasmer tous ceux qui essaient de découvrir le mystère de Dieu. Car en fin de compte, il s’agit bien de cela : entrer dans le mystère de Dieu Lui-même.
Comme chrétiens nous avons aussi à parler d’un mystère : un mystère de moins en moins connu. Nous avons souvent tellement l’impression que le message chrétien n’est plus intéressant que parfois nous ne disons plus rien.
Nous aussi croyants avons à dépenser du temps, de l’énergie, personnellement à essayer de mieux comprendre le mystère de Dieu Lui-même, à nous y intéresser. Qui peut parler plus de dix secondes de la Trinité et dire ce que cela change dans sa vie d’y croire ? Nous nous intéressons à plein de sujets, plein de pensées, de cultures différentes. Pourquoi pas à notre propre Dieu ? Pourquoi ne pas s’intéresser à l’histoire de notre religion pour mieux comprendre notre propre foi, pour mieux comprendre le mystère de la Trinité par exemple ?
Oui, la Sainte Trinité est un mystère. Pour reprendre les textes bibliques de ce dimanche, je dirais à la suite du livre du Deutéronome, que Dieu est mystère car « d’un bout du monde à l’autre, depuis le jour où Dieu créa l’homme sur la terre, il n’est rien arrivé de si grand, on n’a jamais rien connu de pareil, car le Seigneur est Dieu, là-haut dans le ciel comme ici-bas sur la terre, et il n’y en pas d’autre. »
Ce Dieu, pareil à rien, a un nom, ou plutôt trois, qui nous sont révélés dans l’Evangile que nous venons d’entendre : Père, Fils, et Saint Esprit. Vous en conviendrez, ça c’est un mystère ! A la foi simple, – pas de signes énigmatiques -, et à la fois compliqué : un seul Dieu (il n’y en a pas d’autre nous dit le Deutéronome) et trois noms, trois personnes, comme nous disent l’Evangile et la théologie.
A tous les friands du « da Vinci Code », à tous les friands de mystères en général, j’aimerais dire ceci : vous aimez ce livre, ce film, les mystères : très bien. Mais au bout de votre énigme, de votre film, il n’y a plus de mystère. Alors attaquez-vous à un autre mystère : celui de la Trinité, celui du Dieu de votre propre Tradition. Attaquez-vous à la Bible, à tous ses symboles. On peut y découvrir un autre mystère, un mystère jamais levé, jamais fini. Ce mystère est d’un autre ordre, à mon avis bien plus passionnant. Personnellement ce mystère me fait vivre et avancer dans ma vie. Car il n’est pas une énigme, mais une relation avec une personne : une relation de vie, d’amour avec un Dieu qui est lui-même relation puisqu’il est un et trois à la fois. Comme pour tout mystère, le découvrir demande de s’y investir, personnellement. Ce n’est pas moi, ni Dan Brown, ni quelqu’un d’autre qui va vous l’apporter tout cuit sur un plateau.
Peut-être cela vous semble compliqué et impossible à comprendre. Tant mieux. Car comme disait saint Augustin : « Nous parlons de Dieu, qu’y a-t-il d’étonnant si tu ne comprends pas ? Si tu comprends en effet, ce n’est pas Dieu. »
C’est vrai; en fait nous n’en finirons jamais de comprendre le mystère de la Trinité. Tant mieux : à nous de développer le plus important : notre foi et notre amour pour ce Dieu si grand, là-haut et ici-bas sur terre, un et trois à la fois; à nous de garder notre enthousiasme à découvrir son mystère sans fin comme on fonce à la recherche du Saint Graal. La Sainte Trinité : voilà un voyage passionnant et enthousiasmant !