Messe du 6e dimanche de Pâques

 

 

Abbé Jean-Pascal Vacher, à l’église Saint-Pierre, Boudry, NE, le 20 mai 2001.

Lectures bibliques : Actes 15, 1-29; Apocalypse 21, 10-23; Jean 14, 23-29

Chers frères et sœurs présents dans cette église Saint- Pierre de Boudry et vous toutes et tous qui nous rejoignez par les ondes afin de former une communauté plus vaste, comment dans le monde d’aujourd’hui où l’information circule si vite pourrions-nous ignorer les nombreux drames que l’histoire humaine connaît ? Sans être du tout voyant, il y a quelques jours déjà, j’aurais pu être sûr que les nouvelles de 9 heures présenteraient bien des exemples de problèmes humains. Le contraire aurait été une exception qui confirme la règle. Sans être trop sorcier, il n’est pas non plus difficile d’imaginer que chacun d’entre-nous, vivons tout au long de notre vie bien des événements qui sont sources d’inquiétudes.

En ce moment, j’aimerais penser tout spécialement à nos frères et sœurs malades, qui sont dans l’attente d’un diagnostique, d’une opération ou qui luttent pour retrouver la santé. Combien de milliards de situations pénibles notre petite planète connaît pendant ces quelques dizaines de minutes de notre célébration eucharistique ? Qui pourrait le dire ? Le livre des Actes des Apôtres nous fournissait également une situation de trouble et de profond désarroi : Certaines gens venus de Judée voulaient endoctriner les frères de l’Eglise d’Antioche en leur disant : Si vous ne recevez pas la circoncision selon la loi de Moïse, vous ne pouvez pas être sauvés. Cela provoqua un conflit et des discussions assez graves. (Ac 15, 1-2). La relation des païens à Dieu était touchée très profondément.

Frères et sœurs, face à cette masse extraordinaire de souffrances, les paroles de Jésus font-elles le poids : C’est la paix que je vous laisse, c’est ma paix que je vous donne… Ne soyez donc pas bouleversés et effrayés… Si vous m’aimiez, vous seriez dans la joie… (Jn 14, 27…28) ? Ces paroles de Jésus ne sont-elles pas en complet décalage avec la réalité si dure que nous vivons ? Est-ce qu’elles n’ont pas pour but de nous bercer d’illusions ou comme on le disait de la religion il n’y a pas si longtemps d’être l’opium du peuple ? Jésus pourrait-il nous tromper au moment même où il entre dans le drame de sa passion ? Jésus pourrait-il mentir alors qu’il dit juste avant de donner sa vie pour nous : Je suis né, je suis venu dans le monde pour ceci : rendre témoignage à la vérité. (Je 18, 37) Non ! Jésus est pur de tout intérêt, qu’il soit politique, économique ou autre. Ce qu’il dit, il le dit parce qu’il nous aime. Tournons-nous vers l’Esprit saint. Jésus nous a promis qu’il nous enseignerait tout et qu’il nous ferait saisir tout ce qu’il nous a dit.

La joie promise par Jésus comme la paix ne nous est pas donnée à la manière du monde. Elle vient de plus haut. Elle n’est pas simple absence de problème. Elle est sérénité du cœur au sein même de l’épreuve. Elle est fruit de l’amour, d’amitié, qu’on nomme la charité et qui a sa source en Dieu. En effet, d’où vient la joie ? D’où vient la tristesse ? De l’amour mais pour des motifs opposés. La joie est causée par l’amour, ou bien parce que celui que nous aimons nous est présent, ou bien encore parce que celui que nous aimons est en possession de son bonheur.

Ce second motif nous rend joyeux du simple fait que celui que nous aimons est heureux, même en son absence. Au contraire, si l’amour engendre la tristesse, c’est soit parce que celui qu’on aime est absent, soit qu’il est privé de quelque bien ou accablé de quelque mal. Or par la charité, c’est Dieu qu’on aime, Dieu qui est toujours heureux parce qu’il est un océan de béatitude et de paix infinies. Et du seul fait qu’il est aimé, il habite en celui qui l’aime : Celui qui demeure dans l’amour, demeure en Dieu, et Dieu en lui (1 Jn 4, 16). Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole : mon Père l’aimera, nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui (Jn 14, 23).

On comprend que la charité, lorsqu’elle est profondément enracinée dans notre cœur nous faisant aimer Dieu par-dessus tout et donc plus que nous-même, apporte une joie capable de surmonter toutes les vicissitudes de la vie.

C’est cette joie de la charité qui nous est décrite par saint Jean dans l’Apocalypse en des images si pleines de beauté, qui trouvera son plein achèvement dans la gloire du paradis et qui est déjà mystérieusement l’essence de l’Eglise ici-bas : La cité sainte descendait du ciel, d’auprès de Dieu. Elle resplendissait de la gloire de Dieu, elle avait l’éclat d’une pierre très précieuse, comme le jaspe cristallin. Elle avait une grande muraille, avec douze portes gardées par douze anges (Ap 21, 10-12). Ce sont les anges qui gardent les portes de la cité de notre cœur empêchant les puissances du mal d’y entrer et laissant y pénétrer la force de l’amour. La muraille de la cité reposait sur douze fondations portant les noms des douze apôtres de l’Agneau. Sur la terre, cette fondation, c’est la foi héritée des apôtres; et au ciel, c’est la lumière de gloire qui nous fait voir Dieu en face.

Frères et sœurs, que pouvons-nous désirer de plus grand que la puissance de cet amour qui s’épanouit en joie plus vaste que le monde et ses souffrances ? N’est-elle pas notre bien le plus précieux ?

Devant les nombreuses difficultés de l’existence qu’il ne s’agit nullement de minimiser, prenons conscience à quelle altitude elle nous fait monter. Sa marche dépasse infiniment les capacités humaines, mais Dieu ne manquera pas de descendre à notre rencontre.

Comme Pierre, humblement mais sans découragement, disons à Jésus : Seigneur, tu sais tout : tu sais bien que je t’aime (Jn 21, 17). Et Jésus nous répondra : Je te connais; tu comptes beaucoup à mes yeux, tu as du prix et je t’aime; que ma joie soit en toi et que tu sois comblé de joie. (Jn 10, 14; Is 43, 4; Jn 15, 11)
Amen

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